Variations automnales

Mélanie GODIN

honsLe nouveau recueil de Gaspard Hons est composé de deux parties, toutes deux liées à la peinture et à son influence immédiate dans l’acte d’écrire. La première, « Le bel automne », se lit avec l’accompagnement du tableau Painting Table de Philip Guston. Se succèdent au fil des pages de très brèves perceptions, comme des haïkus.

Le lecteur est happé à la fois dans la tête du poète et dans cet univers silencieux qu’il habite et sillonne, englobé dans les brumes colorées du peintre américain. La couleur rouge prédomine : « du rouge, de la matière rouge, et trois châtaignes rejoignant l’automne de la vie ». Le poète a l’art de parler des choses qui n’ont pas l’air d’avoir de l’importance, des éléments du quotidien dont on ne parle presque jamais. Les éléments naturels sont évoqués dans le mouvement d’une marche lente, une harmonie se dessinant entre le corps et le décor. Chaque mot, chaque présence comptent. Une question se pose : « du chemin parcouru, que reste-t-il ? ». Il dit aussi : « si tu veux rester deviens automne, toi-même ». On médite cette sentence. Elle tourne en boucle dans la tête. Elle amorce déjà la deuxième partie du livre qui parle de « ce chemin aperçu entre les mots ». Celle-ci est dédiée à l’ami Jean-Luc Herman récemment disparu, connu pour ses peintures-poésie sur papier chiffon réalisées en collaboration avec de nombreux poètes. Ce texte « La merveille du rien » est d’abord paru sous forme de livre d’artiste. Avec une série de textes plus longs, Gaspard Hons revient sur la question centrale du rien « qui le comble ». De ce rien naissent des bonheurs, des « merveilles » qui le façonnent, comme la réception d’une missive d’un ami ou la lecture d’un livre. Ces instants, magiques, font jaillir de la lumière. Une lumière rare et fugace. On ne peut que partager son point de vue. Dans les livres, on trouve rarement ce qu’on y cherche. On est surpris parfois par ce qu’on y trouve : « Certaines choses ne se trouvent pas dans les livres, certains mots s’y cachent à merveille. On sort des livres l’esprit encombré, la tête vide, jamais on n’en sort rassuré ». Souvent, ils sont un refuge. Il y a aussi « cette part de folie » de vouloir s’y enfermer et « qui nous fait perdre pied ». Hons rappelle l’importance d’aller à la rencontre des choses, pour « apprivoiser » les mots « dans le grand livre de la connaissance ».

Gaspard HONS, Le bel automne suivi de La merveille du rien, Limoges, Rougerie, 2014, 59 p., 12 €