Les remous du temps

Primaëlle VERTENOEIL

mathysÀ un rythme régulier, Philippe Mathys publie des recueils de poésie, souvent d’une grande qualité, tant stylistique qu’esthétique. Avec ce dernier recueil, Les Soubresauts du temps, publié au Taillis Pré, Philippe Mathys approfondit une fois de plus des thèmes qui lui sont chers, parmi lesquels le rapport à la temporalité et à la nature. Sujets poétiques quelques peu « banals » chez certains, ils n’en restent pas moins, sous la plume de Mathys, des préoccupations personnelles d’une grande profondeur.

L’ouvrage, dont on apprécie la sobriété et l’élégance propres aux éditions Taillis pré, se découpe en trois parties : « Cendres », « Dans les plis des souvenirs », « Épluchures du  soleil », qui se font mutuellement écho, au fil de la lecture. « Cendres » s’ouvre sur une citation d’Henri Thomas, « Jours remplis de cendres, sans que je sache ce qui a brûlé en moi » et évoque, avec beaucoup de réflexion poétique, les traces de cette fuite du temps, notamment sur le narrateur. La deuxième partie, quant à elle, interroge plus concrètement le souvenir et aussi sa fonction :

On se penche sur ses souvenirs comme on se penche sur un puits. Au fond, la surface est trop sombre pour savoir si l’eau est restée claire ou si le temps l’a rendue trouble

« Épluchures du soleil », quant à elle, rappelle l’omniprésence de la nature – qu’il s’agisse de plantes ou d’oiseaux –, matrice de nombreux poèmes. Si l’on peut donc aisément distinguer une structure et une thématique pour chaque partie, il est tout aussi possible de dégager une certaine homogénéité formelle dans l’écriture de ce recueil qui passe notamment par le poème en prose.

Les vers de Mathys sont d’une grande élégance : chaque figure de style et chaque mot choisi est d’une grande précision stylistique :

Je m’appuie sur la vague des jours pour garder la tête hors de l’eau, pour que l’écume ne vienne pas aveugler mon regard. Dans les remous du temps, je suis un enfant qui agite les bras comme les ailes déplumées. Je rêve d’un envol

Amateur d’art, Philippe Mathys a collaboré avec Sabine Lavaux-Michaëlis pour le frontispice du recueil, qui se mêle harmonieusement à sa poésie.

Philippe MATHYS, Les Soubresauts du temps, Liège, Le Taillis Pré, 12 €