Entre ‘Kanun’ et ballets roses

Patrick DELPERDANGE, Comme des chiens, Bruxelles, ONLiT, 2015,275 p., 18 € / ePub : 8.99 €

Comme des chiensSon livre précédent chez ONLiT éditions nous apprenait que Patrick Delperdange est un sale type. Son dernier roman, Comme des chiens, paru chez le même éditeur, vient confirmer que Delperdange n’est pas un ange. Dans un registre différent : celui du pur polar.

Le prix Rossel 2005 pour Chants des gorges, chez Sabine Wespieser, peut faire preuve d’une écriture au couteau, qui prend aux tripes et noue la gorge. Avec Comme des chiens, Patrick Delperdange propose une enquête de facture plus classique. Son privé, Carlo Salinas, de l’« Agence Miller & Salinas. Enquêtes et recherches » est mandaté par Sylvia Koster pour retrouver son mari Daniel. Auteur de romans policiers violents, il a disparu depuis peu. Parallèlement, l’enquêteur est poursuivi par un Albanais qui n’a guère apprécié que sa sœur Malisha ait connu une nuit torride dans les bras de Salinas.

D’un côté, Carlo Salinas craint les conséquences du Kanun, le code d’honneur et de sang d’Albanais assez tatillons sur les relations sentimentales de leurs femmes, de l’autre il investigue dans des milieux troubles et glauques, comme ceux de la prostitution enfantine et de la pédophilie, pour retrouver Daniel Koster. Les obstacles se multiplient sur les pistes de son enquête, il est victime de plusieurs agressions et traîne tout au long des 275 pages du roman une main sanguinolente et douloureuse.

Patrick Delperdange a du métier et multiplie les fausses pistes avec une grande fluidité dans l’écriture. Il sait camper des atmosphères, notamment dans la ville portuaire de Steenkerke ou à l’occasion d’une course finale en forme de cauchemar dans le château retiré de Vaulx-les-Tombes. Ou encore quand la récurrence d’une odeur musquée, puissante et acide signe le passage d’un meurtrier violent et insaisissable. Par l’entremise des amours de Carlo Salinas dans son Alfasud, il parsème ses pages de touches d’érotisme que ne renierait pas un Henri Vernes. Delperdange pratique également l’art du portrait psychologique, dont celui de son héros au travers duquel il rend un discret hommage à James Ellroy. Il prête même à ses personnages des réflexions sur la vie, sur le bien et le mal, comme celle-ci relative à la culpabilité et la responsabilité :

Mes pensées ne sont pas les miennes, mes gestes n’ont rien de personnel. Je n’en suis pas le responsable. Quoi que je fasse, mes actes sont guidés par un autre que moi. On ne peut donc pas m’en faire grief. Quelles que soient les infamies que je commette, je suis exonéré de la faute et du remords, puisque je n’en suis pas le véritable auteur.

On peut même penser que c’est… l’auteur qui nous le dit.

Michel TORREKENS

♦ Écoutez Patrick Delperdange lire un extrait de Comme des chiens sur Sonalitté