Sans issue

Odile VANHELLEMONT, J’aurais aimé te voir une dernière fois, Memory, coll. « Jeunes auteurs », 2016, 135p., 13€ ISBN : 978-2-87413-317-6

vanhellemontHayley, une jeune femme d’une vingtaine d’années, a récemment rompu avec Félix, pas parce qu’ils ne s’aimaient plus, mais parce que « [l]eur amour était trop grand pour eux ». Enivrés par la fusion du premier amour, les tourtereaux se sont heurtés à la complexité d’une relation de couple. En manque d’outils pour mieux vivre leur idylle, ils ont décidé de se séparer et de « recommencer à s’aimer » quand ils seront plus mûrs.

Le roman s’ouvre sur le suicide de Félix auquel Hayley assiste, impuissante. L’histoire se centre alors sur le processus de deuil de la jeune femme. Écrasée par un immense chagrin et par la culpabilité, persuadée que cet amour perdu est irremplaçable, Hayley est tourmentée par des nuits d’insomnie et de cauchemars. Ses repères se sont brisés, ses proches se sentent impuissants.

Son père la retrouva là au petit matin. Il ne savait que dire, que faire, alors il la souleva et la porta jusqu’à sa chambre. Il n’était pas souvent là, et quand il était là, il se sentait impuissant. La détresse de sa fille le rendait maladroit, il ne savait pas comment s’y prendre pour l’aider. Alors il se plongeait dans le travail, où il se sentait utile, compétent, apte à faire ce qu’on attendait de lui. Face à sa fille dévastée, il ne pouvait qu’essayer vainement de faire bonne figure.

Parce qu’il lui est devenu impossible de continuer à vivre chez elle, de supporter les regards de pitié et d’être envisagée « comme sa veuve et rien d’autre », Hayley part suivre des cours de danse à New-York avec son amie Victoria. Convaincue qu’elle oubliera rapidement ses démons, elle déchante vite : un rien lui rappelle Félix, elle fond régulièrement en larmes. Sans ses parents et dans une ville aux multiples tentations, elle plonge alors dans LA solution des jeunes pour fuir : sorties, alcool, drogues, sexe sans lendemain,…

Elle détestait ce qu’elle voyait. Elle se détestait. Elle se sentait piégée dans une personne qu’elle ne reconnaissait pas. Elle ne savait pas quoi faire pour que les choses redeviennent comme avant. Elle ne savait même plus exactement comment elle en était arrivée à ce point. Plus que jamais, elle aurait eu besoin de stabilité mais ne s’était jamais sentie aussi proche d’un équilibriste sur le point de tomber. Elle sentait qu’elle n’avait plus aucune prise sur quoi que ce soit, et ça l’effrayait. Terriblement.

J’aurais aimé te voir une dernière fois est le premier roman d’Odile Vanhellemont, lauréate pour ce livre du Prix Jeune Public Brabant Wallon de la Fondation Laure Nobels. Elle nous donne à lire un récit avec une ambiance de road movie, qui nous emmène dans la jeunesse argentée américaine et nous rappelle que les épreuves frappent aussi de plein fouet les personnes des classes aisées. La structure narrative de l’histoire est bien construite, les personnages sont crédibles avec l’immaturité propre à leur jeunesse, mais ils auraient pu avoir davantage de relief si les clichés qui les caractérisent étaient gommés. Le style est travaillé et intéressant, ce qui est à saluer chez cette jeune auteure.

Séverine Radoux