À gauche ou à droite ? Là où ça gratte !

Alex VIZOREK, L’échappé belge : Chroniques et brèves, Kero Éditions / France Inter Éditions, 2017, 240p. , 15.90€/ePub : 11.99 €, ISBN : 9782366583991

vizorek l echappee belgeSi sa langue bien pendue oscillait entre deux pays – le nôtre et celui de nos comparses d’outre-Quiévrain – pour son premier recueil (Chroniques en Thalys) Alex Vizorek s’est cette fois bel et bien installé en France et notamment à Inter. Ce deuxième volume reprend donc la quintessence de trois années de chroniques radio féroces et facétieuses élaborées pour le 7/9 des studios rouges, et des brèves ou détournements d’extraits de presse insolites. Les Belges ne sont pour autant pas oubliés : ce sont Kroll et Vadot qui ponctuent les pages de leurs crobars et l’humoriste a réservé une trentaine de pages supplémentaires à sa mère patrie, incluant neuf capsules de Café Serré à l’ensemble. On y croisera notamment Laurette Onkelinx, Georges Dallemagne ou Paul Magnette.

À l’autopsie, de quoi furent faites ces années ? Qu’est-ce qui attira l’œil ou l’oreille de celui qui se qualifie d’ « Achille Zavatta de l’actu » ? Tout d’abord la religion face à l’époque, comme la bénédiction des smartphones dans une église de Lyon (« Dieu c’est un peu comme Free : tout le monde ne le capte pas bien »), le Remake de la Bible (« Heureusement tout de même que ça n’est pas Proust qui s’y est mis, la création du monde aurait duré plus d’une semaine »), ou les selfies à la Mecque. Face à Caroline Fourest, fervente laïque, le trublion va jusqu’à professer sa conversion au pastafarisme, une religion dont le dieu est un monstre volant fait de spaghettis (« quitte à ce que les religions nous prennent pour des nouilles, autant l’assumer jusqu’au bout »).

Ensuite, bien évidemment la vie politique, car au-delà d’un passage de mandat présidentiel à un autre, les raisons de gratter sous la surface furent nombreuses. Vizorek passe au crible les inégalités sociales soulignées par la loi travail et l’affaire des chemises déchirées, ou s’interroge sur la dégringolade de la popularité de François Hollande, le vote Front National et les travers de Fillon (« c’est couillon de demander à un ami de dépenser 48000 euros pour un costard, alors que moi, comme ce matin, je reste disponible pour lui en tailler un »).

Impossible également de ne pas se souvenir que ces trois années furent traversées par les attentats et conséquemment un regain d’esprit sécuritaire (Djihadistes belges, Terrorisme et Saint-V) – parfois différemment appliqué qu’on se trouve en France ou en Belgique (L’état d’urgence) – mais aussi par la crise des migrants (« Commençons par le transport : le trajet aller est à votre charge, mais pour le retour, Fedasil s’occupe de tout ! »).

S’il nous manquera peut-être un peu dans ce volume les inflexions vocales – la radio est un medium qui nous est cher et que nous continuerions bien de concevoir pour lui-même et sans aucune image, n’en déplaise à la volonté virale – ces textes tiennent sur leurs deux jambes et rebondissent à qui mieux mieux sur l’époque. Dans notre prochaine virée de passager en BlaBlaCar, on préférera donc leur compagnie à une Chasse au Pokémons.

Anne-Lise Remacle