Décès de Jacques Cels

jacques celsNé à Bruxelles en 1956, Jacques Cels est décédé le 17 février. Il laisse une oeuvre variée de romancier, dramaturge, nouvelliste et essayiste. 

Voici ce qu’écrivait Laurent Demoulin dans Le Carnet et les Instants n° 126 (janvier 2003) à propos du roman de Jacques Cels, La poudrière, paru aux éditions Luce Wilquin en 2002 : 

Le silence de l’artiste

En plus de vingt ans d’écriture, Jacques Cels a publié onze livres touchant à dif­férents genres, poésie, nouvelles, ro­mans, théâtre, essais littéraires (notamment sur Michaux et sur Bataille). Une part de la pluralité de cette inspiration est à l’œuvre dans son dernier-né, La poudrière, qui est as­surément un roman, mais que l’on pourrait également décrire comme un essai fictif. Le narrateur, Julien Chaville, profite en effet de l’absence de sa femme et de ses enfants pour rédiger un mémoire sur l’œuvre d’une peintre qu’il a personnellement découverte vingt ans auparavant et qui, depuis lors, est reconnue mondialement. Cette artiste, appelée Made­leine Trenner, était déjà une vieille dame quand il l’a rencontrée et elle n’avait plus que deux ans à vivre. […]

La profondeur du questionnement porté par La poudrière pourrait rappeler certains romans de Thomas Bernhard, sauf que, contrairement au génial Autrichien dont l’inspiration se nourrissait d’une haine intarissable et robora­tive, c’est l’amour qui meut le narrateur chez Jacques Cels. Et toutes les personnes que Ju­lien Chaville rencontre sont bienveillantes et généreuses, cultivées et aisées, de sorte qu’il peut s’adonner à ses passions intellectuelles sans se soucier des contingences matérielles. Il serait possible ici d’opposer à Cels la fameuse phrase de Gide selon laquelle « C’est avec les beaux sentiments que l’on fait de la mauvaise littérature. » Mais ce serait tout à fait injuste et la gentillesse n’empêche nullement ici le récit et la réflexion d’avancer jusqu’à la pou­drière du titre — qui explose là où on ne l’at­tend pas. S’il fallait faire un reproche à l’auteur, il serait d’un autre ordre : la passion avec laquelle le narrateur cherche à faire revivre le passé le pousse à s’attacher aux moindres dé­tails, ce qui se traduit par une exhaustivité jus­tifiée, mais peut-être excessive du point de vue du lecteur. Il n’empêche qu’avec La poudrière Jacques Cels est parvenu à marier le roman et l’essai tout en évoquant l’impossible mariage de la peinture et de la littérature.


Lire aussi : Jacques Cels nouvelliste dans la revue Marginales


Bibliographie sélective de Jacques Cels : 

Baratin, Cyclope, 1978
Mâchures, Point de fuite, 1979
États d’un motif d’absence, Talus d’approche, 1981
Le batyscaphe, Labor, 1994
Le déjeuner de Paestum, Luce Wilquin, 1996
Le cloître de sable, Luce Wilquin, 1998
Les îles secrètes, Luce Wilquin, 2000
La poudrière, Luce Wilquin, 2002
Stefan Zweig, un écrivain dans la cité, Renaissance du livre, 2003
Le dernier chemin, Luce Wilquin, 2006