Au nom du père… et de toute la famille

Un coup de cœur du Carnet

Luc LEENS, Le père que tu n’auras pas, Quadrature, 2022, 129 p., 16 €, ISBN : 978-2-931080-20-7

leens le pere que tu n'auras pasPère absent, père décédé, père légitime, père naturel, père inconnu, « père » comme titre religieux, père maltraitant, père aimant, père dont on s’éloigne… figures paternelles… patriarcat aussi. Et puis les femmes ! Les épouses, les mères, les grands-mères, les filles, les amours passionnées, contrariées, secrètes ou affichées. Et leurs suites… Parce que si chacune des douze nouvelles a un rapport plus ou moins évident avec la thématique paternelle annoncée dans le titre, c’est toujours le lien qui est au centre de l’histoire. Les liens du sang, avec un père retrouvé ou découvert, avec une grand-mère rencontrée ou une mère révélée sous un jour nouveau. Les rapports amoureux, de jeunesse, éphémères mais à l’empreinte indélébile, dans la tête et plus si affinités ; ou au long cours, « jusqu’à ce que la mort nous sépare ». Les relations amicales capables de changer une vie ou d’adoucir la douleur. Toutes ces connexions entre hommes, entre femmes, entre hommes et femmes, qui déterminent la place de chacun dans la société, et participent à son identité, toujours fruit d’un parcours unique et personnel.

Dès ses premiers mots, dans un style net et précis, chaque texte nous plonge dans l’intimité des protagonistes. Très vite, le décor est installé, une ambiance se met en place et nous fascine. Transmission orale, confessions écrites, témoignages croisés (dans le particulièrement brillant « La peau d’une femme ») ou récit classique d’un narrateur omniscient, les styles varient mais la magie demeure et ce, quelle que soit la longueur du texte. En quelques pages savamment dosées, parfois à peine deux, on se retrouve projeté dans un univers ciselé, peuplé de personnages complexes qui suscitent notre empathie, notre sympathie ou notre animosité.

La nouvelle n’est pas un roman en manque de rebondissements ou d’ambition. C’est un genre à part entière, multiple. Luc Leens le démontre avec talent et réussit en outre à créer un recueil extrêmement cohérent. Si bien qu’à chaque dénouement, on en redemande, dévorant Le père que tu n’auras pas, non comme une suite de textes indépendants mais bien comme une saga à suspense.

Estelle Piraux

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