Werner Lambersy et Didier Sperlet, Plaques d’égout

Le goût des plaques

Werner LAMBERSY et Didier SERPLET, Plaques d’égout, Bruxelles, CFC Editions, Coll. Regards sur la ville, 2008, 88 p., 41 photos couleurs.

97829300188360-581438L’art du photographe n’est-il pas de révéler à notre regard ce qui lui échappe bien souvent ? Avec l’ouvrage Plaques d’égout, l’artiste plasticien et photographe français Didier Serplet y contribue largement en nous invitant à ralentir, une fois n’est pas coutume, notre pas et à baisser les yeux.

Son objectif a capté au ras des trottoirs ces plaques d’égout entrées dans le paysage urbain au point de s’y confondre. Des plaques d’une étonnante variété, repérées essentiellement à Bruxelles, mais aussi dans d’autres villes belges et européennes comme Anvers, Liège, Gand, Paris, Cologne, Venise, Capri, Barcelone, etc. Ces prosaïques plaques que les égoutiers nomment joliment « regard pour trottoir » prennent ici une valeur poétique, à l’intersection symbolique de l’aérien et du souterrain, de la lumière et de l’obscurité, de l’exposé et du caché si l’on considère qu’elles sont une porte vers l’écoulement de nos déjections diverses et multiples.

La portée symbolique, quasi initiatique, de ces bouches d’ombre, Werner Lambersy la traduit en une prose poétique dont il accompagne les photos de Serplet. Evoquant les filles de trottoir, les labyrinthes urbains, la mémoire des villes, l’humaine agitation, le déchet, le déchu, le déchargé, le poète belge nous dit les mystères « des masques de fer forgé ».

Michel Torrekens


Article paru dans Le Carnet et les Instants n°156 (2009)