Stéphane BISSOT, Celle qui aimait les hommes, Oiseaux de nuit, coll. « Romans à jouer, pièces à lire », 2023, 70 p., 10 €, ISBN : 9782931101681
Louise est actrice. De manière totalement non chronologique, elle se remémore ses histoires d’amour. « [Elle] écrit la nuit. La lumière est douce. Elle écrit à plusieurs âges. Il y a plusieurs présents. Pendant qu’elle parle à l’homme qu’elle aime, à celui qu’elle aimait ou à celui qu’elle aimera, elle raconte ses amours profondes ou fugaces ». Il y a Samuel, rencontré lors d’une soirée de soutien aux ouvriers, qui est tendre comme un agneau et auprès de qui elle redécouvre sa sensualité. Il y a Romain avec qui elle ne passe qu’une nuit, Arié, un homme pivot dans sa vie auprès de qui elle apprend la mort de son père ou encore Andréas dont elle croque la pomme à New York. Chacun reçoit un surnom : l’homme femme, l’homme rustre, l’homme silence, l’homme arbre… Louise se souvient aussi de son premier amour à l’école, Quentin, dont elle connaissait l’emploi du temps par cœur.
Chaque histoire est entrecoupée par des SMS, souvent osés, qu’elle reçoit ou écrit, ou des adresses directes à ses amants. À travers ces histoires livrées sur le papier, Louise reconstitue le fil de ses expériences, se cherche, s’adresse à ses amours anciens ou présents, ceux qui l’ont construite ou au contraire détruite. « Des histoires commencent, des histoires finissent. Certaines prennent vie alors que d’autres ne sont que courants d’air. Pourquoi celle-ci s’enracine, et celle-là pas ? Pourquoi celle-ci fait mal alors que celle-là effleure ? »
Ce texte de Stéphane Bissot, écrit sur une période de vingt ans, livre une intimité, tout en finesse et sensibilité, un poil voyeuriste. L’autrice convoque le romantisme, la sensualité et n’a pas peur de laisser s’exprimer son désir, d’oser l’érotisme :
Il se délecte de moi offerte sur le lit. Il me palpe, me goûte, me lèche passionnément. Je n’ai pas le choix, je suis à lui. Je le veux. Sa langue miel, redoutable, est partout. Elle cherche, lape, trouve. Je ploie sous ses assauts. Sa chaleur m’enivre. Mon sexe appelle. Ses doigts lui répondent, rebondissent sur mes parois tendres. Il me tient toute entière dans sa main. Ses baisers me dévorent les seins. Je n’y tiens plus.
Stéphane Bissot ancre Celle qui aimait les hommes à Bruxelles et se plait à utiliser quelques belgicismes. Des vérités sur l’amour côtoient un certain humour et quelques phrases percutantes comme : « Une seconde excitante peut devenir dégoûtante en une fraction d’hésitation ». Le texte, publié aux éditions Les oiseaux de nuit, a bénéficié de quelques lectures, malheureusement arrêtées par le premier confinement.
Émilie Gäbele