Roland LADRIÈRE, Un refuge chez Vermeer précédé de Le détail pur dans l’indistinct, Taillis pré, 2019, 82 p., 14 €, ISBN : 978-2-87450-146-3
“Que demander sinon l’intensité ?” Ces mots, rencontrés au détour des poèmes en prose de Roland Ladrière composant Un refuge chez Vermeer précédé de Le détail pur dans l’indistinct, pourraient être placés en exergue du recueil.
Impressions subtilement gravées, images incisives ou nuancées, éclairs de plénitude ou d’amertume dessinent une partition où la confidence ouvre sur le mystère.
« Tu prononçais parfois dans le sommeil le nom de l’être aimé ; et j’aiguisais ma jalousie à cette pierre inattendue, moi qui prenais à ton corps ma lumière et mon vin. »
« J’ai traversé la nuit, moins pour elle que son souvenir ; pour garder sa couleur et son grain sur ma peau quand l’absurde soleil se lèvera. »
« Il eut soudain l’impression que les mots qu’il traçait sur la page se diluaient ; que les lettres se révoltaient, recomposaient dans une langue ancienne et perdue un poème indéchiffrable, le plus beau qu’il eût jamais écrit. »
« L’effroi d’aimer nous saisira comme au premier jour, le tremblement sous la caresse, dans le déchirement de la joie. »
Les évocations d’Un refuge chez Vermeer, qui clôt le livre, touchent par l’unisson d’un regard pénétrant et d’une discrète tendresse.
À propos du tableau La Jeune fille au turban : « Cette œuvre est sublime parce que Vermeer ne peint pas un modèle, ce qu’il peint, c’est son admiration et son amour pour un être. »
Plus loin : « De telles images suscitent à l’infini le rêve. […] Il y a autour de Vermeer le halo d’une eau fraîche où dormirait un soleil doux. »
Francine Ghysen