Quête éperdue

Aylin MANÇO, Les éblouis, Sarbacane, 2022, 381 p., 18 € / ePub : 12,99 €, ISBN : 9782377318537

manço les eblouisLe nouvel opus d’Aylin Manço commence en début d’année scolaire : Luce se réjouit d’entrer à l’internat mixte de Jamet afin de gagner en autonomie et de s’éloigner quelque peu d’une mère envahissante. Elle se fait rapidement des amis dont nous suivons les préoccupations typiques de l’adolescence.

L’héroïne est toutefois un peu déçue car elle s’attendait à plus d’aventures et de magie dans sa nouvelle vie. Son vœu est exaucé quand ses camarades développent chacun à leur tour des pouvoirs surnaturels. La vieille histoire du fantôme de l’école ressurgit : il y a une cinquantaine d’années, un élève est décédé là-bas dans des circonstances mystérieuses. Y a -t-il un lien entre les deux faits ? Luce et ses nouveaux amis se réunissent régulièrement pour tenter de comprendre ce qui leur arrive, mais ils doivent également organiser des séances d’entraînement pour apprendre à maîtriser leur pouvoir, qui prend de plus en plus d’ampleur, devient difficile à cacher et assez handicapant au quotidien.

Parallèlement, nous sommes amenés à lire le destin d’Augustin, le fantôme de l’école, et nous comprenons peu à peu le lien entre cette vieille histoire et la magie qui s’empare des adolescents de Jamet…

Dans Les éblouis, Aylin Manço donne une large place aux dialogues et aux tâtonnements des premiers ébats sexuels des héros. Elle met en valeur les déboires amoureux sous un angle particulier : leur intensité crée un terrain favorable aux jeux de pouvoir, surtout que l’héroïne, Luce, veut être le centre de tout.

Alors elle était la dernière et la seule à ne pas être… maudite, admettons. Ça lui paraissait pire d’être seule que d’être damnée. En faisant ses tours de piste, elle les énuméra : Nolan et les vitres, Nour la bourrasque de froid (elle la sentait la dépasser à l’instant), Élise qui avait terrassé le chêne, Sara et les pannes de courant, Justin qui planait le nez en l’air assis sur un banc à côté de la piste, sa jambe plâtrée flottant devant lui, Alex et sa lumière, Timo et – Bref. Elle était la dernière. Elle qui se savait si spéciale, désormais la seule oubliée. Pourquoi ? Et cette question rebondissait en même temps que ses foulées – pourquoi, pourquoi, pourquoi ? 

Et si vous ajoutez à l’égocentrisme classique adolescent plusieurs amours à sens unique, vous obtenez un cocktail explosif où les jeunes peuvent sentir leur être tout entier fissuré par un amour non réciproque.

Que ce soit il y a 50 ans ou aujourd’hui, la quête éperdue d’amour reste d’actualité et la peine infinie d’un chagrin amoureux est tout aussi intense et douloureuse. L’autrice dépeint avec justesse les parts sombres et ambivalentes des adolescents. On regrettera toutefois un manque de tension dramatique dans le récit, les enjeux de l’histoire n’étant pas clairement définis.

Séverine Radoux

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