S’ouvrir à l’essence de la vie

Philippe LEKEUCHE, Poème à l’impossible, Peintures de Jean Dalemans, Taillis pré, 2018, 74 p., 10 €, ISBN : 978-2-87450-125-8
lekeuche poeme a l impossible

Tu retournais le Bonheur
Le mettais à l’envers
Et tu voyais ce qu’il recouvre
Un gouffre caché
Ton cœur trembla
L’espérance fut brin d’herbe au fond du désert
Ne mourut point 

De ce Poème à l’impossible, grave et beau comme son titre, Philippe Lekeuche dit à mi-voix qu’il lui est venu, un jour de mai, le visitant sans qu’il s’y attendît, et est reparti, tout aussi mystérieusement, à la fin de l’automne, le laissant plus ouvert à « l’essence de la vie ». Écrivant comme sous sa dictée.

Au fil des strophes, il nous semble écouter une confidence, deviner un secret, partager un instant rare. L’émotion s’entrevoit, palpite, se dérobe. Le Temps rôde, « blessure et pansement ».

La Poésie habite, hante les jours.

Pour mon heur et pour mon malheur
M’a frappé l’étoile Poésie
Jusqu’à mon ventre descendue
Implose continûment là
L’air de rien, je vaque à la prose 

Et même si tout est fragile, à l’image des peintures de Jean Dalemans qui s’harmonisent subtilement aux vers, la joie, imprévisible, inexplicable, illumine soudain un crépuscule qui se grave dans la mémoire :

En auto passant par le sous-bois
Celui qui mène au château, ma maison  
Les grands bouleaux sombres, debout
Formant un couloir
Lumière rose, ardente, coulant sur leurs troncs
Aura baignant mon passage
Comme  si – oui, comme si – c’était le Bonheur

Francine Ghysen