Thierry LEFÈVRE, Les histoires de la baraque, Lansman, 2018, 123 p., 12 €, ISBN : 978-2-8071-0212-5 – Spectacle à Bruxelles du 19 au 30 mars 2019

On imagine aisément la scène de théâtre expressionniste, les planches de chêne nues aux murs et au sol, une chaise de pin pour seul mobilier, des herbes en brins sur le bas du pantalon, la rosée dans la voix sépulcrale, un tableau bucolique de cabane, des couleurs plus sombres que vives, un éclairage de braises et l’ancien temps retrouvé du griot, du barde, du fableur, du magicien des mots et du conteur de vérités comprises sans démonstration.
Alors je me seois
Contre un tronc je me seois
Dans comme un trou d’un tronc
Je dis tronc mais pas tronc non
Arbre
Thierry Lefèvre, auteur, acteur, metteur en scène, cherchant forme et fond, creuse, exerce, expérimente, figure et stylise, fouille, invente en profondeur comme on découvre des cavités dans l’âme. Il en extrait Les histoires de la baraque qui sont huit fables, en ont le ton, l’esprit, la manufacture poétique, le délicieux mystère. Celui-ci même de l’écriture, plus que tout un rythme, une respiration, un verbe comme à l’origine. Une naissance, une inspiration nourrissant d’abord un corps de pensées muettes, mues ensuite en une longue expiration, bientôt une chorale avec la nature, la clé des chants du monde.
Moi qu’étais pas d’ici
Qu’étais seulé tout seulé
Qu’étais brindille
Qu’avais atterri là un jour de drôle de vent
L’écriture devient orale, retrouve ses origines, ses sources, ressources et raisons d’être. On dirait que les histoires se construisent sous les yeux sur le papier, comme un slam sur scène, une harmonieuse improvisation, où l’esprit est à son comble, à la fois pris, surpris et pointu, tendu vers la suite qui lui tend les bras, l’aspire, les mots appelant les mots ; d’urgence ou au contraire lentement, par alliances.
J’entendais pas les mots
Pas bien
Une musique oui
Mais pas bien
Farceur. Les deux derniers vers résument tout de Paco, Le cœur de l’autre, L’homme de l’arbre, Le castelo, Le bourreau, Lise, Pacome et La parlotte de mars :
Une plume
T’entends ?