L’ami King chez Lamiroy

Gorian DELPÂTURE, Stephen King. Le plus grand écrivain du monde ?, Lamiroy, coll. « L’article », 2020, 33p., 4 €, ISBN : 9-782875-953674

delpature stephen kingLe principe du nouveau mensuel lancé par les éditions Lamiroy en octobre est désarmant de simplicité : L’article est en effet composé d’un seul… article signé d’une plume belge et dans lequel est tracé le portrait sensible d’un auteur ou d’un artiste, passé ou présent, de chez nous ou d’ailleurs. Sont déjà prévus un hommage à Jacques De Decker par Véronique Bergen (en novembre) et une apologie d’Arno entonnée par Thierry Coljon (en décembre). Et on annonce du Victor Hugo, du Jean-Patrick Manchette, peut-être même du Camille Lemonnier… C’est dire le parti pris de diversité et d’audace qui préside à une telle entreprise – à l’époque ou, paraît-il, la critique littéraire n’intéresse pas grand monde si elle ne passe pas par une vidéo rimant en -tioube ou une recension capsulée qui tient en un pépiement.

D’une plume enlevée et efficace, Gorian Delpâture a inauguré la série avec une figure incontournable de la littérature dite populaire – qui est souvent la crème de la crème de la Littérature majuscule : Stephen King. Aurions-nous affaire là au plus grand écrivain du monde, se demande le « chroniqueur nécrobibliophile », ainsi que l’ont baptisé ses collègue du Boulevard Reyers. La question est rhétorique, elle pourrait même, sans provocation, avoir pour corollaire : « L’auteur de Shining ne mérite-t-il pas enfin le Nobel ? »

Stiveun (mince, voilà trente-cinq ans que je prononce mal), Stephen King donc, Delpâture en atteste à chaque ligne, est maître en toutes choses : la créativité, la narration, la productivité, l’originalité, la peur, le style, la variété des genres. Et puis quelle vie authentiquement américaine de self-made-writer pour ce monstre d’énergie, qui partagea longtemps ses journées entre enseignement mal rémunéré, heures sup’ abrutissantes dans une laverie et nuits blanches hantées par l’étudiante brimée qui allait lui donner son premier best-seller (Carrie), un saint-bernard enragé (Cujo), un petit garçon à l’auriculaire tendu et grondant « redrum » devant son miroir (Shining), ou encore un romancier à succès séquestré par la plus barrée de ses fans (Misery). Bénies soient les insomnies de ce géant portant d’indéfectibles jean’s, baskets et casquette de quelque club de base-ball, car elles allaient déboucher sur la plus cauchemardesque des Comédies humaines contemporaines et nous faire frissonner jusqu’à aujourd’hui.

L’ami King chez Lamiroy, voilà qui marque des débuts rugissang comme le moteur Plymouth Fury 1958 pour une revue certes de petit format (14×10 cm) mais déjà de très grande envergure…

Frédéric Saenen