Françoise LISON-LEROY et Matild GROS, De la terre dans mes poches, CotCotCot, coll. « Matière vivante», 2021, 20 p., 10,50 €, ISBN : 978-2-930941-31-8
Françoise LISON-LEROY et Raphaël DECOSTER, Tous mes cailloux, CotCotCot, 2021, 44 p., 19,90 €, ISBN : 978-2-930941-32-5
Un grand carnet souple, Tous mes cailloux, un petit livret coloré, De la terre dans mes poches, et nous voilà plongés dans les sons et les odeurs des mots de Françoise Lison-Leroy accompagnés des dessins de Matild Gros et de Raphaël Decoster. Des univers graphiques entourant les poèmes de Françoise Lison-Leroy que l’on rencontre dans le catalogue de la maison d’édition Cotcotcot. La matière, terre, pierre et cailloux, est le sujet principal de ce premier livret et ce premier carnet entamant de nouvelles collections.
Dans De la terre plein mes poches, collection « Matière vivante », Matild Gros dessine les mots de Jean Jardinier, poème ricochant dans les souvenirs des adultes. Fourrer les mains dans la terre et s’en mettre plein les ongles, en ramener dans la maison. Avoir une trace de frais du dehors à l’intérieur. On imagine le Jean Jardinier joyeux, amenant dans ses poches un peu de terre du jardin. Jean jardinier, le poème, est paru en 97 aux éditions Luce Wilquin dans le beau recueil Dites trente-deux. Souvenez-vous, « quatre fois eux, quatre fois moi, quatre fois rien… ». Matild Gros l’a dessiné. Elle apporte en couleur la douceur du végétal. Comme des impressions de fougères autour de la terre. Ce livret, ces mots, ce poème, ces couleurs, ces dessins partagent avec nous la nature, le temps à prendre, les promesses de joie. Du reste, on ne peut être insensible à la démarche de l’éditrice : des encres végétales, du papier recyclé, une reliure faite avec grand soin par une entreprise de travail adapté. L’objet rend hommage lui-même aux mots de François Lison-Leroy, à Jean Jardinier.
Tandis que ce premier texte dans la collection « Matière vivante » conte la terre, le deuxième, écrit pour ce grand Carnet 01, nous raconte les cailloux. Le carnet est grand et beau. Le dessin composé de milliers de traits de Raphaël Decoster donne à penser qu’il aurait pu dessiner encore et encore des milliers de ces cailloux baladins, musiciens, mariniers… et nous perdre dans la rêverie. Le dessin et le poème de Françoise Lison-Leroy roulent côte à côte. L’un et l’autre se répondent, s’emmènent. La collection est décrite comme un terrain de recherche graphique et poétique et c’est une réussite. On caresse ce caillou gaufré en couverture, plein de promesses. Le carnet Tous mes cailloux est pour tous, mais il résonne différemment pour les collection-heureuses de cailloux et galets. Celles et ceux qui lorsqu’ils quittent la plage continuent de faire rouler les cailloux, les galets dans leur poche pour garder encore la plage dans les mains. Celles et ceux qui lorsqu’ils déménagent gardent des cailloux de leur terre d’avant dans un pot sur le plan de travail de la cuisine.
Est-ce qu’au pays des collines, la poétesse collectionne les cailloux de sa terre ? Est-ce qu’au pays des collines, les cailloux qui roulent dans nos doigts rappellent le roulis de la mer, le lit de la rivière ? L’univers de Françoise Lison-Leroy coloré, dessiné par Matild Gros et Raphaël Decoster, très différent l’un de l’autre, nous emmène dans la terre, sur la plage, dans nos souvenirs et on a bien envie d’y rester et d’y traîner un peu. On a de la terre et des cailloux plein les poches et plein le cœur et pourtant ces deux lectures nous rendent légères, légers.
Hélène Théroux