« Ma plus belle histoire d’amour, c’est vous »

Régine VANDAMME & cie, Et si les animaux nous rendaient moins bêtes, Renaissance du Livre, coll. « Histoires vraies », 2022, 208 p., 20 € / ePub : 9,99 €, ISBN : 9782507057374

vandamme et si les animaux nous rendaient moins betesEn 2019, Régine Vandamme fait la douloureuse expérience de perdre, dans la même semaine, deux animaux de compagnie, sa chatte et sa chienne. Face à ce vide cruel, des questions intimes l’assaillent : que faire de leur dépouille ? comment surmonter leur absence ? quel quotidien recréer sans elles ? comment soulager la peine, immense ? D’autres pensées plus générales éclosent en parallèle, concernant la relation de l’être humain et de l’animal. Pour permettre une mise en perspective, un élargissement des horizons et une meilleure compréhension de leur coexistence, Vandamme émet un appel à histoires, collecte de nombreux récits et les rassemble dans Et si les animaux nous rendaient moins bêtes ?

Les nonante-cinq histoires vécues qui composent le recueil se présentent anonymement. À la fin de l’ouvrage, en parcourant la liste des plumes contributrices, des noms apparaissent (dont ceux de Lorenzo Cecchi, Francis Dannemark, Aliette Griz et Françoise Lison-Leroy) et d’autres demeurent dans un anonymat choisi. C’est notamment ce qui confère une dimension à la fois personnelle et universelle au projet : chaque récit pourrait être celui de tous, tout en se révélant éminemment individuel. Le livre propose une étonnante unité stylistique, l’attention de Vandamme ayant porté sur une harmonisation presque musicale de l’ensemble, bien que chaque voix se fasse distinctement entendre dans son originalité.

Les animaux provoquent en nous des émotions diverses. Ils peuvent intriguer, effrayer, attendrir, séduire, attirer, émouvoir, interroger, amuser, décontenancer. Qu’ils se montrent cajoleurs, protecteurs, obéissants, méfiants ou agressifs, il est impossible de leur rester indifférent. Ces sentiments multiples sont racontés, en quelques lignes ou plusieurs paragraphes, à travers l’évocation d’une rencontre ou d’un départ, la narration d’un compagnonnage, la focalisation sur un épisode particulier. On découvre ainsi qu’une abeille pique alors que la mort l’a déjà cueillie, que l’alliance d’un canidé et d’un félidé sauve un nourrisson convoité par un python, que les mésanges se délectent des patates des camionneurs hongrois, qu’un singe s’éclate à lancer des œufs du haut d’un frigo, que les corneilles volent aussi les petites cuillers en argent, que les pacifiques carpes Koï gobent les reinettes, qu’un coq scandalisé refuse d’être cuisiné pour la Saint-Fiacre, que la carapace d’un escargot ne vaut pas celle d’une tortue, que les mouches se connectent à l’au-delà, que les merles font saliver les grands-mères, que les pinsons repèrent infailliblement la salle de bains des appartements qu’ils visitent, qu’une renarde hardie insuffle la vie aux retraitées esseulées… Ces témoignages autour de chiens et de chats, de chevaux, de rongeurs, de volatiles, de ruminants, d’insectes, de poissons et autres bêtes vibrent (souvent) de gratitude et d’amour. Tous laissent la trace d’une rencontre qui a rendu définitivement plus humain et « [l]eur lecture nous élève ».

Samia Hammami

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