Sea, sex and sun

Stanislas COTTON, Un fou dans la manche, Avin, Luce Wilquin, 2015, 222 p., 20 €

Un fou dans la manche, c’est un commissaire de police en vacances – mais non content de l’être –, avec sa compagne Mariana – « sa belle, mi-elle, mi-lui […], son monsieur-madame, sa mademoiselle-monsieur » –, dans le village d’origine de son père, une chaude semaine de septembre. C’est aussi une panoplie d’autochtones – Salvatore Voltino et Andrea Pastore, « deux grands ados désœuvrés en mal de sensations », une jeune fille, Elena Lanfredi, au regard « étrangement azuré », un père aubergiste, Agata, une vieille « au dos voûté par les ans », un pharmacien shooté, une « grande perche » qui assure les livraisons du supermarché, un curé obsédé par les seins de sa femme de ménage, excellente cuisinière par-dessus le marché, etc. –, le Camping Mare Blu (« trois étoiles et une chique »), « ses gémissements la nuit, sous les toiles de tentes et sous les étoiles, […] ses grincements de sommiers, plutôt moyens, dans les bungalows », son barman Gianluigi dit Luigi dit Billy, « prédateur à la peau tannée, aux trois neurones séjournant dans les couilles » et les derniers touristes de la saison. Un fou dans la manche, c’est encore des cadavres, celui d’une femme d’abord – une Allemande, Linda –, retrouvé sur la plage, puis un autre, puis des autres… et le va-et-vient d’anges gardiens dépités de n’avoir su veiller sur leur petit protégé.

Avec ce quatrième roman, le deuxième mettant en scène le commissaire Santino Cuffaro après Rosalinde Miller (Luce Wilquin, 2014), Stanislas Cotton projette le lecteur dans l’effervescence d’un village italien jusqu’ici sans histoire. Dans une atmosphère de fin d’été rendue étouffante par l’imminente éruption de l’Etna tout proche, les destins se croisent, les esprits s’échauffent, les sens s’éveillent. Alliances, jeux de séduction et déconvenues – les rapports humains, dans toute leur complexité – sont au cœur de l’intrigue, dans laquelle le lecteur progresse au gré des courtes scènes qui se succèdent, dynamiques, comme autant de chapitres au style toujours vif et sans détour, parfois cru, presque vulgaire, et à l’humour teinté de cynisme. Qu’ils soient héros, personnages secondaires ou simples rencontres fortuites, tous les protagonistes, d’une vraisemblance et authenticité confondantes – on a tous un Voltino, Pastore, Agata, ou autre Billy parmi nos connaissances – qu’ils se côtoient, se séduisent, s’aiment ou se déchirent, prennent part à l’histoire, avec une extrême justesse, qui contraste quelque peu avec le caractère démesuré, presqu’absurde, du bain de sang dont le lecteur est témoin. De concours de circonstances en concours de circonstances, les plus bas instincts se réveillent, révélant la part sombre de chacun…

Mais déjà, l’assassin est arrêté, les anges ont repris leur envol, les congés touchent à leur fin et nos deux vacanciers, las, attendent l’avion – en retard – qui les ramènera chez eux.

À quand la prochaine affaire du Commissaire Cuffaro ?

Marie DEWEZ