D’une vie à l’autre

Armel JOB, Une femme que j’aimais, Robert Laffont, 2018, 296 p., 19,5 € / ePub : 12.99 €, ISBN : 9782221215449

job une femme que j aimaisLa vie de Claude ne fait pas vraiment rêver. Aide-pharmacien de profession, il occupe son temps libre au cinéma et en rendant visite à sa famille le week-end. Ses parents d’une part et surtout, sa tante Adrienne, quinquagénaire au charme indéniable, qui a marqué la mémoire de tous les hommes qui ont croisé sa route. Claude lui voue une sorte de culte et, de son côté, elle éprouve une grande affection pour son neveu. Leur relation et leurs rendez-vous hebdomadaires ne réjouissent pas leur entourage et font jaser dans la famille.

Lors d’une de leurs rencontres, Adrienne fait part à son neveu de sa volonté de lui confier un secret avant sa mort. Mal à l’aise tant à l’idée de recevoir une telle confidence qu’à celle d’envisager le décès de cette femme qu’il adore, Claude refuse à plusieurs reprises d’écouter, remettant toujours à plus tard cette conversation qui peut attendre. Si bien que le jour où il trouve au sol le corps sans vie de sa tante, il n’a toujours aucune idée de ce qu’elle souhaitait partager avec lui. De plus, les circonstances de ce décès s’avèrent rapidement moins limpides qu’à première vue. Commence alors l’enquête de Claude qu’il narre lui-même, étape par étape, chacune remettant en cause la précédente.

Histoires d’amour, récits de vie, pistes, hypothèses, confessions, tout est au pluriel dans ce roman. Le narrateur se livre sur lui-même, raconte plusieurs versions de la vie de sa tante au fur et à mesure de ses découvertes, tout en abordant le destin des nombreux témoins interrogés. Une galerie de personnages a priori banals mais qui ont chacun vécu quelque chose de remarquable pour qui prend la peine de s’y intéresser. Armel Job semble expliquer qu’on ne connaît jamais vraiment les gens et nous rappelle que chacun porte ses propres remords, mène ses propres combats, parfois en toute confidentialité ou dans l’indifférence générale.

La force de ce roman, ce sont ses personnages et les liens qui les unissent. L’enquête et les nombreuses rencontres racontées permettent, outre de reconstituer comme un puzzle la vie de l’héroïne, de cerner le narrateur et d’appréhender les personnalités des différents intervenants. Tous ont quelque chose à apporter à l’histoire, tous sont importants pour la progression de l’enquête. On comprend vite que chaque révélation en amènera une autre et on lit ce livre comme on suit un feuilleton, presque surpris qu’il finisse par prendre fin.

Estelle Piraux