Les musées rouvrent cette semaine! Parmi eux : le Famenne & Art Museum (FAM). Moyennant le respect des nouvelles normes d’hygiène, il sera possible de voir une exposition, initialement programmée en mars, et consacrée aux éditions Cactus inébranlable, sous le thème « Quand littérature et art se rencontrent ». Elle permet de découvrir les oeuvres d’art qui rehaussent les couvertures de la maison d’édition.
L’exposition
S’arrêter à l’aspect extérieur n’est pas toujours l’expression d’un caractère superficiel, c’est même parfois le contraire. Peut-on transposer cette hypothèse au monde de l’édition? La couverture d’un livre est-elle, en d’autres termes, révélatrice de ce qu’elle renferme? L’expression anglaise « Don’t judge a book by its cover » – devenue très commune depuis son premier emploi en 1867 et qui se traduit par « Ne vous fiez pas aux apparences » – sonne comme une mise en garde.
Le soin grandissant apporté à la couverture depuis le milieu du 19e siècle, le succès remporté par une maison d’édition à la charte graphique percutante telle Zulma et les différentes études révélant le rôle de la couverture dans l’achat de livres, ne peuvent qu’attester de son importance. La vente en ligne risque par ailleurs d’amplifier ce phénomène.
L’exposition Cactus Inébranlable propose aux visiteurs d’admirer les œuvres qui ont servi à agrémenter les couvertures de la maison d’édition basée à Amougies. Cette démarche inédite permet de confronter l’illustration et l’œuvre d’art, de remettre en avant l’original devenu une image reproduite à des fins commerciales. Elle change l’équilibre des forces en bousculant le statut de reproduction de l’œuvre et sort l’image de son rang de paratexte éditorial.
Exposer ces peintures, estampes, photographies… est aussi une manière de mettre en avant l’un des aspects du travail d’éditeur. Dans ce cas, c’est le regard de Jean-Philippe Querton qui est mis à l’honneur. Ce touche-à-tout atypique, épris de mots et déçu par ses divers éditeurs de l’époque (car il est aussi auteur) a fondé Cactus Inébranlable éditions en 2011. Spécialisé dans le domaine de l’aphorisme, de l’apophtegme et plus généralement dans la forme brève, le Cactus dispose désormais d’un catalogue de près de 130 références signées notamment par Jacques Sternberg, Raoul Vaneigem, André Stas, Éric Dejager, Jean-Louis Massot, Francesco Pittau, Freddy Tougaux, Jacky Legge, Dominique Watrin etc.
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Parmi les œuvres visibles au sein de l’exposition se trouve une huile sur toile de Remy Van den Abeele intitulée L’appel réalisée par le plasticien sonégien auquel un espace est consacré au sein du Famenne & Art Museum. La peinture présentant un œuf orné de la mention « fragile » est reproduite en noir et blanc sur la couverture de La rechute d’Icare, écrit par Michel Delhalle. Ce titre, comme tant d’autres, est révélateur de l’esprit caustique, potache, absurde que cultive cette maison d’édition qui apprécie aussi la parodie et la provocation. Des collages d’André Stas aux dessins de Serge Poliart en passant par les travaux de Capitaine Lonchamps, Emelyne Duval, Joëlle Pontseel… ce sont autant d’univers que le Cactus est parvenu à brillamment accoupler aux textes qu’il a publiés.
Qu’un tel rapprochement entre deux disciplines qui se soutiennent l’une l’autre n’ait jamais suscité un réel intérêt a de quoi étonner ; un verbe que Cactus Inébranlable éditions et le FAM se plaisent à conjuguer.
Les plasticiens exposés
Priscilla Beccari, Massimo Bortolini, Capitaine Lonchamps, Emelyne Duval, Gwen Guégan, Michel Jamsin, Philippe Lemaire, Thierry Lenoir, Mickomix (Scott Double-Fesse), Mir Li, Jean-Marie Molle, Benjamin Monti, Ben Parva, Serge Poliart, Joëlle Pontseel, Michel Recloux, Maxime Riquelme, Dominique Saint-Dizier, Jean-Claude Salemi, André Stas, Remy Van den Abeele, Robert Al Varlez, Jean-Paul Verstraeten, Claire Veys et Willoos.
Le mot de Jean-Philippe Querton
Dans le métier d’éditeur, la question de l’habillement du livre n’est pas de celle qu’on écarte ; s’il y a quelque chose qui cloche, on y retourne, immédiatement.
Un livre doit être beau.
Cela semble si évident qu’on le mette sur son trente et un pour affronter les regards des futurs / potentiels / éventuels lecteurs.
Dans l’histoire du Cactus, nous avons rencontré des auteurs qui étaient aussi graphistes, plasticiens, collagistes… et qui nous proposaient leurs propres illustrations ; d’autres auteurs avaient quelques idées, des pistes, que parfois nous avons suivies, parfois pas. Puis — et cela concerne l’immense majorité des projets que nous avons concrétisés — ceux qui ont affirmé nous faire confiance. Ceux-là s’étaient occupé des mots, rien que des mots, ils avaient conçu le bijou et nous demandaient de nous occuper de l’écrin. Et nous nous sommes rendu compte que les artistes étaient bien souvent heureux de voir leurs œuvres placées en frontispice, sur la première de couverture, contrastant magnifiquement sur le fond blanc du papier.
En pratique
FAM – Famenne & Art Museum
Rue du Commerce, 17 – 6900 Marche-en-Famenne
A partir du 19 mai
L’entrée au Musée se fait uniquement sur rendez-vous, par téléphone au 084/32-70-60 ou par email (fam@marche.be).
www.famenneartmuseum.be