Christian LIBENS, L’ardent dictionnaire des auteures & auteurs liégeois, Éditions de la Province de Liège, 2021, 203 p., 18 €, ISBN : 9-782390-101765
Les éditions de la Province de Liège publient un Ardent dictionnaire des auteures & auteurs liégeois. Signé par Christian Libens, l’ouvrage allie le ludisme à l’érudition.
Qu’est-ce qu’un auteur – ou une autrice – liégeois ? À consulter la liste des nombreuses entrées de l’Ardent dictionnaire, la réponse de Christian Libens à cette question est pour le moins accueillante. Linguistiquement, tout d’abord : on trouve des auteurs écrivant en français, en wallon, en allemand… Génériquement, aussi : les bédéistes et les slameurs voisinent avec les romanciers, les poètes et les dramaturges. Plumes oubliées ou écrivains connus, talents émergents ou auteurs confirmés, les notices dévoilent un monde littéraire d’une étonnante variété.
Géographiquement, encore : Liège s’entend ici plus comme la Province que comme la Ville. Sont en outre estampillés « auteurs liégeois » tous ceux qui sont passés un jour par la Principauté, ou on écrit un livre dans laquelle elle tient une place. Par exemple, Nicolas Marchal, né et vivant en Province de Namur, figure dans le livre en raison de « sa folle année liégeoise partagée entre un boulot de technicien de surface et un autre de barman de nuit dans le Carré » et de son roman Les faux Simenon, dont l’intrigue se passe à Liège. Quant à la notice consacrée à Alain Bertrand, elle permet à Christian Libens de jouer avec ses lecteurs :
Mais où donc Liège se cache-t-elle dans toutes ces références bibliographiques ? Eh bien, particulièrement dans les nouvelles de plusieurs recueils… Quelques titres pour guider votre chasse aux trésors du genre […]
Couplée à l’angle très large adopté par l’auteur, la forme abécédaire ne dégage pas une unité, une caractéristique commune à tous les écrivains mentionnés. Le volume ne cherche pas à définir ce que serait la littérature liégeoise, mais il démontre que Liège est terre de littérature, voire que tout auteur serait (au moins un peu) liégeois.
La riche nomenclature de L’ardent dictionnaire est complétée par des pages hors-texte. Roses, elles proposent des listes (« Liège en dix romans », « Les pseudos de Simenon », « Les romans liégeois », « Lauréats du prix Marcel Thiry »…) et des citations (« Vues de la ville et de ses vallées en vrac », « Simenon vu par lui-même », « Simenon vu par les autres ») ; ivoire, elles présentent des sélections illustrées, consacrées à l’œuvre de Bernard Gheur, de Caroline Lamarche, de Christine Aventin, aux polars liégeois ou à Simenon… Complément bienvenu au dictionnaire proprement dit, ces quelques approches choisies rehaussent l’ouvrage et transforment une liste alphabétique toujours un peu aride en une belle réussite éditoriale. On y reconnaitra bien sûr la subjectivité de l’auteur, qui affiche sans fard ses dilections. La large place accordée à Simenon, notamment, n’étonnera pas quand on connait le… pedigree de Christian Libens, qui a signé plusieurs livres sur le père de Maigret.
Le livre s’ouvre d’ailleurs sur cet avertissement : « Ce dictionnaire n’a rien d’un ouvrage ‘sérieux’ : il est partiel et partial ». On lira alors les différentes sélections opérées par l’auteur soit comme de judicieux conseils de lecture, soit comme des invitations à les confronter à ses propres goûts et (p)références.
Ainsi L’ardent dictionnaire illustre-t-il les mots de Jean Claude Bologne, glissés dans ses pages roses :
Liège, dans mon imaginaire, est resté cette invitation au voyage, ce moïse jeté au fleuve où embarquent rêveurs et poètes.
Nausicaa Dewez