Constance CHLORE avec Paul NOUGÉ, Il faut penser à travers tout. À petits pas autour de Nougé et par fragments, Maelström, coll. « Bookleg », 2022, 3 €, ISBN : 978-2-87505-424-1
En 1927, Paul Nougé écrit le texte La messagère, repris dans les Œuvres complètes de Nougé publiées aux éditions Allia en 2017, avec le célèbre texte Les objets bouleversants. Moins de cent ans plus tard, en 2022, Constance Chlore et les éditions Maelström nous donnent à relire des extraits de l’œuvre nougéenne au travers de ce petit bookleg, Il faut penser à travers tout. Le titre est un vers de Nougé, réactualisé par Constance Chlore dans le « poème-documentaire » qui précède les deux textes de l’écrivain. Deux sections composent donc ce bookleg pour le moins étonnant. La première section, intitulée « À petits pas autour de Nougé et par fragments », est le poème-documentaire de Constance Chlore. La seconde, donne à lire les textes susmentionnés de Paul Nougé.
Bruxelles.
193, rue Belliard
il enfile sa blouse blanche.
1919 : il entre au laboratoire.
[…]
Déployé sur une petite dizaine de pages à la typographie extrêmement resserrée, le poème-documentaire de Constance Chlore compile des éléments biographiques (son travail de biochimiste ou sa relation avec sa seconde femme, Marthe Beauvoisin), des données bibliographiques concernant l’œuvre de Nougé, des témoignages (notamment de Marcel Mariën ou de Robert Gossens) qui évoquent le lien de Nougé avec le surréalisme bruxellois. Il comporte également des notes de Constance Chlore, qui s’aventure, de manière éparse, dans le dédale de la vie et l’œuvre complexe de Nougé.
Lèvres épaisses
pipe au bec
il fabriquait des objets.
Des objets en verre, envoyés à ses amis.
À Gide : une sangsue dans un bocal.
[…]
La fonction « documentaire » de ce poème est patente, même si l’entièreté du texte de Constance Chlore manquerait de prime abord de consistance. Le texte prend en effet l’allure d’un carnet de notes ou d’observations ; il rappelle le premier document que réalise tout chercheur pour tenter de relier tous les éléments d’une hypothèse. Son mérite est de rendre visible et accessible l’œuvre encore trop peu connue de Paul Nougé.
Au lecteur de se perdre dans les associations d’idées inévidentes de ce poème-documentaire, ou de s’y appuyer pour chercher plus loin encore, pour creuser davantage, en se faisant le réceptacle de ce vers de Nougé dans Les objets bouleversants :
RAPPELONS SANS NOUS LASSER
QUE
L’EXPÉRIENCE CONTINUE
Charline Lambert