Thomas LAVACHERY, Henri dans l’île, École des loisirs, 2022, 229 p., 12,50 € / ePub : 8,99 €, ISBN : 9782211323437
Suite au naufrage du Nugget en 1887, Henri Malden est le seul rescapé sur l’île Litke. Ce jeune homme de 24 ans échoue sur la rive dans un état de prostration avec trois compagnons qui ont succombé dans ce périple. Il se remet en mouvement pour les enterrer dignement et opérer un repérage sur l’île.
Ses priorités sont désormais d’assurer ses besoins vitaux : manger, dormir et se protéger des intempéries. Nous le voyons évoluer dans une nature sauvage où il apprend à pêcher et chasser. Il s’habitue peu à peu à sa situation et concentre toute son attention sur la vie animale pour tantôt s’en servir, tantôt s’en protéger.
Les obstacles sont nombreux pour un être humain vivant seul sur une île sans vêtement de rechange et sans outil. Son quotidien est jalonné de renoncements faute de matériel sur place (« Une existence misérable où les victoires étaient moins nombreuses que les défaites »). Il mène une vie routinière et modeste où un souci de santé peut prendre des proportions inquiétantes.
Revoir le monde après une longue cécité est une expérience inoubliable. Le rescapé entre en contemplation comme on entre en religion. Il se plaît à regarder les êtres et les choses qu’il avait perdus de vue, et qu’il redécouvre sous un jour nouveau. La feuille d’arbre, le papillon, le nuage, le paysage de mer ou de terre – tout l’intéresse d’une façon intense et presque douloureuse.
La solitude et la fatigue lui pèsent parfois, raison pour laquelle il éprouve le besoin de parler seul ou d’apprivoiser un perroquet. Lorsque les réserves de nourriture sont presque épuisées, il se rend sur l’île voisine dans une traversée périlleuse. Outre l’alimentation abondante qu’il y trouvera, il fera une rencontre inattendue avec un animal réputé hostile vis-à-vis des humains, mais avec qui il va tisser un lien fort et composer un langage commun.
Dans ce nouvel opus pour la jeunesse, Thomas Lavachery nous offre une belle histoire où l’être humain est mis à sa juste place dans l’immensité de la nature. À travers un schéma narratif simple bien construit, il déroule le fil de son récit en soignant son style, comme à son habitude, et nous fait sentir l’atmosphère grâce à un vocabulaire minutieusement choisi.
C’était l’été, et le temps demeurait exécrable. Pluie et bourrasques, nuages perpétuellement bas, froid mordant – ce lieu était l’enfer. Henri, pourtant, n’avait pas le temps de se morfondre. Ses journées se passaient à courir les buissons et les plages à la recherche de proies. L’expérience faisant, il devenait de plus en plus adroit. Ses projectiles cueillaient les oiseaux sur leur branche, ses mains nerveuses saisissaient les poissons entre les roches.
Comme dans ces précédents récits, l’auteur a ponctué Henri dans l’île d’illustrations où il fait la part belle aux animaux et aux panoramas insulaires qui nous permettent de visualiser des détails ou des espaces plus vastes. Un ouvrage de qualité, à n’en pas douter.
Séverine Radoux
Plus d’information
- Thomas Lavachery, un aventurier de l’écriture (Le Carnet et les Instants n°201, 2019)
- Thomas Lavachery : « Nos ados ont droit à la meilleure littérature » (22/03/2020)
- La fiche de Thomas Lavachery