Quelque chose « à vivre malgré tout »

Yves NAMUR, Dis-moi quelque chose, Arfuyen, 2021, 14 €, ISBN : 978-2-845-90310-4

 Dis-moi quelque chose
Que je puisse interroger le nuage

L’ouvrir
Le défaire de fond en comble
Le creuser

L’aimer tout simplement 

namur dis moi quelque choseDis-moi quelque chose épouse le calendrier des saisons, leurs cycles, leurs éléments et leurs couleurs. Au sein de chacune d’elles, « quelque chose » est donné à entendre, à espérer. Le poème vient, dans ce recueil d’Yves Namur publié aux éditions Arfuyen, déposer une voix, vibrant au diapason du ténu, de l’incertain, de l’inespéré. Ainsi, dans le « dis-moi », dans cette adresse – à l’autre, au lecteur, à soi-même – qui ouvre chacun des sizains, s’entend l’espoir d’une parole, d’une formulation. Ce dernier constitue autant le noyau que le fil rouge de ce recueil.

Chacune des quatre sections épouse les motifs associés à chaque saison dont elle se fait l’écho contemplatif, l’écoute attentive. Chacune des saisons est placée sous l’égide des vers d’un poète, « l’automne » avec Paul de Roux, « l’hiver » avec Paul Celan, … comme pour accompagner polyphoniquement ces « prières adressées à l’inconnu ». Celles-ci, aux puissances destructrices de l’ « effondrement », de l’abîme et des colères, viennent soulever une matière pour tenter de lui faire face : un « désir de vivre », un « murmure », une « clarté », une « rose »,… pour que « le cœur s’ouvre à l’improbable ». Un dernier sizain, posé en « coda » au recueil, vient tant appuyer la dimension musicale de l’ensemble que ramener la parole à l’essentiel, au silence, à la simplicité, quand le « trop » excède le vécu.

Dis-moi quelque chose s’inscrit pleinement dans le cheminement poétique d’Yves Namur à la suite, notamment, du Livre des sept portes (1994), des Ennuagements du cœur (2004), de La tristesse du figuier (2012) ou Les lèvres et la soif (2016), où les motifs de prédilection d’Yves Namur sont dans le recueil présent au service d’une poésie qui souhaite croire en l’inespéré.


Lire aussi : Le mot, le réel et la pensée. La poésie d’Yves Namur (C.I. n°203)


Dis-moi quelque chose s’adresse peut-être également à l’écoute – l’écoute des saisons et ce qu’elles disent, l’écoute d’une parole qui s’y fraie un chemin, l’écoute des polarités qui s’opposent ou se rassemblent, l’écoute attentive de l’ « entrouvert ».

Dis-moi quelque chose
Qui couperait en deux le silence

Lorsque celui des pierres
Ne suffit plus à entendre la voix
Et le cœur battant

De l’insupportable 

Charline Lambert