« Le jour sent bon le cerisier »

Francine GHYSEN

caremeL’ultime recueil posthume de Maurice Carême, Sac au dos, nous emmène sur les pas du poète, chantant les chemins buissonniers, s’émouvant des paysages, cueillant images et impressions.

Crayon et cahier dans sa besace, il vagabonde dans la campagne brabançonne chère à son cœur :

Un bois de pins qui semble bleu, / Là-bas, sur l’horizon brumeux, / Puis une allée de peupliers / Montant sans fin dans la clarté, / Et vous tenez là, tout entier, / Ce doux Brabant où je suis né.

S’enthousiasme devant « la splendeur verte » de la mer :

Dieu ! qu’aujourd’hui la mer est belle ! / Le dirai-je jamais assez. / Belle, mais belle à crier / Pour qu’on l’entende jusqu’au ciel.

Se balade à travers la France, des rues de Rouen aux collines de Corrèze ; de Reims, où il imagine croiser l’ombre de Paul Fort, à Rodez :

La ville est là-haut, près du ciel / Que transperce la cathédrale. / Mieux vaut mettre, pour y monter, / Des ailes d’ange à ses sandales.

Contemple les barques à Honfleur ; un lourd chaland passant sur le canal tranquille.

S’enchante de l’été chatoyant en Beauce :

Rien que du blé sous le soleil, / Rien que du soleil sur le blé. / Et rien, rien d’autre à l’horizon, / Ni arbre, ni haie, ni maison. / Au-dessus, un ciel tout en or / Comme si là, oui, là encore / S’étalait jusqu’à l’infini / Du blé translucide et jauni.

Mais le poète sait que, si partir à l’aventure est enivrant, la beauté et la joie nous attendent tout près, pour peu que nous sachions les surprendre dans la fraîcheur de l’instant, la simplicité du cœur :

J’ai entendu la fleur qui parle, / L’oiseau qui rit au bord du ciel. / Je n’étais pas en Arles, / Mais aux environs de Bruxelles.

Maurice CARÊME, Sac au dos, photographies de Jeannine Burny, Lausanne, L’Âge d’Homme, 2015, 248 p., 19 €