Une conséquence à de petites méchancetés

Marc MENU, Alors, c’est du jazz, Quadrature, 2019, 100 p., 10 € / ePub : 6.99 €, ISBN : 978-2-930538-98-3

Après ses courtes nouvelles réunies dans l’ouvrage Petites méchancetés sans grandes conséquences publiées en 2015 aux Éditions Quadrature, Marc Menu nous revient en nous proposant d’autres nouvelles réunies, aux mêmes éditions, sous le titre Alors, c’est du jazz. Ce titre est issu d’une citation de Novecento Pianiste de Baricco, placée en exergue à ce recueil.

Nous retrouvons dans ce recueil le même humour grinçant de Marc Menu que dans ses Petites méchancetés, émaillées quelquefois de poésie. Car l’auteur a plus d’une corde à son arc : rappelons qu’il a également publié des recueils poétiques, notamment les Murmures du chardon (Le Taillis Pré, 2016), mais aussi En chemin (La Taupîne, 2016) et Pen Duick (La Taupîne, 2018).

Ce serait donc moi, ce type hagard, surpris par la photo. Ce type au faciès de repris de justice. Ce serait donc moi, ces yeux écarquillés, arrachés à grand peine au sommeil de la nuit… j’interromps là ma contemplation pour ne pas déprimer plus avant. Et sans un regard de plus pour ce naufrage, je tends ma carte d’identité à l’employé. 

Parmi quelques motifs récurrents de l’écriture de Marc Menu, la mer en est un, qui apparaît également dans ce recueil, comme par exemple dans cette nouvelle intitulée « Un désert de coquillages » :

Le vent a fait le ménage. Le ciel en bleuit de froid. L’hiver, ici, ne rencontre aucun obstacle. L’horizon tout entier fait silence. Un ou deux matinaux, chacun suivant son chien, passent au large. Et au large, aussi, les bateaux. Pendant ce temps, la mer te parle à l’oreille. Et personne, pas même toi, ne saura les mots qu’elle t’aura chuchotés. 

Marc Menu se met au diapason de ces petits ou grands instants qui jalonnent « les méandres de son existence » et ce, « avec la curiosité tranquille du passant. De temps en temps, il s’arrête pour prendre note d’un paysage, d’une idée, d’une rencontre », indique la quatrième de couverture. Le rire semble pour Marc Menu le meilleur remède face à toutes les situations, qu’elles soient douces, affligeantes ou tristes, que nous rencontrons lors du vaste théâtre qu’est la vie. Il en rend compte, dans ces brèves nouvelles, avec toujours une chute estampillée « Marc Menu ».

Voilà, c’est fini. Le rideau est retombé sur la trois-centième. La scène est vide, plus de décors, plus de comédiens. Le petit théâtre retourne à son silence, jusqu’aux prochaines répétitions.

Dans les coulisses, il s’attarde, n’arrive pas à s’en aller pour de bon. Pense aux flammes de l’enfer, qui viennent de s’engloutir pour la trois-centième fois.

La lumière s’éteint. Dom Juan s’éloigne, que la nuit va envelopper. 

Marc Menu nous le prouve encore dans Alors, c’est du jazz : il continue d’arpenter la vie avec son sourire amusé, de la croquer à pleines dents, tout en la faisant toujours un peu grincer.

Charline Lambert