Véronique BERGEN, Jacques De Decker. L’immortel de l’Académie royale de Belgique, Lamiroy, coll. « L’article », 2020, 40 p., 4 € / ePub : 1.99 €, ISBN : 9782875953698
Nouvelle collection de petits formats à parution mensuelle des éditions Lamiroy, « L’article » livre son deuxième volume. Véronique Bergen y esquisse Jacques De Decker, L’immortel de l’Académie royale de Belgique.
L’exercice d’admiration est le cœur même de la collection (pour le premier numéro, Gorian Delpâture parlait de Stephen King comme du « plus grand écrivain du monde »). Dans ce genre codifié, Véronique Bergen a choisi d’évoquer celui qui a été le Secrétaire perpétuel de l’Académie pendant dix-sept ans, l’écrivain, le traducteur et intellectuel dont le décès le 12 avril 2020 a plongé le monde littéraire belge dans la sidération. Dans l’hommage de l’académicienne à celui qui l’a accueillie dans la vénérable institution le 17 novembre 2018, l’émotion affleure souvent.
L’espace strictement délimité d’un « article » empêche d’ambitionner de dire tout. A fortiori lorsqu’il est question de « l’homme-orchestre » Jacques De Decker. Que l’autrice approche dès lors par deux figures littéraires qui ont ici valeur de métaphores.
Celle du poète Pessoa, tout d’abord, à qui Jacques De Decker « qui pratiquait autrement l’hétéropraxis sans passer par l’hétéronymie » a consacré une communication à l’Académie.
Celle de Thyl Ulenspiegel, le héros fondateur des Lettres belges, ensuite. Jacques De Decker le présentait comme son personnage de fiction préféré :
lui l’arpenteur des Lettres, le Thyl Ulenspiegel des XXe et XXIe siècles qui veillait à ce que la flamme des Lettres ne s’éteigne point sous le rouleau compresseur de la logique matérialiste.
À l’aune de ces deux géants, Véronique Bergen évoque en particulier l’homme de théâtre : co-fondateur du théâtre de l’Esprit frappeur, Jacques De Decker a été un auteur et adaptateur de théâtre hyperactif, travaillant sur les plus grands, de Shakespeare à Brecht en passant par Tchékhov.
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Ces adaptations nombreuses et variées annoncent d’autres facettes de la vie et de l’œuvre Jacques De Decker : son rôle de passeur – exercé notamment dans sa fonction de journaliste culturel, ou lors des nombreuses rencontres littéraires qu’il a animées –, ou encore le polyglottisme de celui qui germaniste de formation, siégeait aussi à l’Académie flamande (Koninklijke Academie voor Nederlandse Taal- en Letterkunde), où il avait succédé à Liliane Wouters.
Académicien : la fonction seyait comme un gant à l’auteur du Ventre de la baleine, élu à l’Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique en 1997 et Secrétaire perpétuel de l’institution de 2002 à 2019. Véronique Bergen évoque l’action qu’il a menée pendant toutes ces années pour que l’Académie remplisse pleinement son rôle de lieu de réflexion, à la fois en prise sur le monde et émancipé de la tyrannie de la rentabilité.
Secrétaire perpétuel dévoué, ami fidèle (l’autrice s’attache d’ailleurs à citer les amis écrivains, artistes, les compagnons de route, les maitres), le passeur a laissé au second plan l’écrivain. À cet égard, le petit livre paru chez Lamiroy a aussi la vertu de saluer une œuvre littéraire encore méconnue.
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Paru quelque six mois mois après le décès de celui à qui il est consacré, Jacques De Decker. L’immortel de l’Académie royale de Belgique s’interroge sur l’héritage de Jacques De Decker et esquisse un premier bilan. Où il est question de nostalgie et d’ouverture.
Nausicaa Dewez