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Boustro 7. La création comme indocilité

Boustro, revue plastique et poétique animée par Laurent DANLOY, Pascal LECLERCQ, Karel LOGIST et Paul MAHOUX, n°7, novembre 2018.

Dans le paysage éditorial, certaines revues portent le flambeau d’une création qui échappe aux fourches caudines de la littérature marketing. Créée en 2015 par les poètes Karel Logist et Pascal Leclercq, par les artistes plasticiens Laurent Danloy et Paul Mahoux, Boustro appartient à cette tribu de revues qui privilégient l’expérimentation et l’exploration d’univers hors normes. Passant au format A3, le numéro 7 réunit quatre plumes qui griffent le monde, y creusant des terriers — parfois stellaires — où vivre, et un artiste plasticien qui impose un cataclysme visuel en noir et blanc. Les textes de Nathalie Gassel, Maud Joiret, Christophe Kauffman et Vol-au-vent, les dessins de Monsieur Pimpant nous font quitter terre. Par-delà la singularité des cinq créateurs, une lame de fond commune, celle de l’indocilité, d’une soif d’un autre réel qui passe par la chair à vif, la fête des corps. Construisant ses textes comme elle sculpte son corps, en quête d’une compacité sémantique qui libère une beauté singulière faite de désirs mordus par la blessure, Nathalie Gassel (auteure de textes saisissants, Éros androgyne, Construction d’un corps pornographique, Abattement…, photographe) livre, sous le titre  « Frida » des stèles poétiques interrogeant l’espace obscur où gisent les défunts, les affres du corps défait. On pense à Frida Kahlo luttant avec un organisme brisé, on reçoit en instantanés chimiques une écriture qui ouvre les portes que la société prend soin de sceller. L’écriture de Nathalie Gassel n’a que faire de la joliesse d’une littérature adepte des surfaces. Elle creuse jusqu’à ouvrir le corps et entrer dans la chair.

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Boustro ? Fais donc !

Un coup de coeur du Carnet

Boustro, revue plastique et poétique animée par Laurent DANLOY, Pascal LECLERCQ, Karel LOGIST et Paul MAHOUX, n° 2, juin 2016

Boustro2Quelle ébullition revuistique dans la Cité ardente, et de quelle qualité ! En décembre 2015, le premier numéro de Boustro, « fruit de rassemblements autour de l’amitié et de la recherche du bel-être » s’y multipliait à 200 exemplaires « numérotés et choyés » et essaimait hors du nid que lui avaient amoureusement ménagé pour l’occasion les éditions du Tétras-Lyre. L’empennage de ce drôle d’oiseau rassemblait Véronique Janzyk, dont les proses calibrées chutent dans le temps à la faveur d’un séjour à Corfou (là où les touristes allemands ignorent que « le silence est parfois une langue aussi ») ou dans la chambre 350, occupée par cet être cher dont le cœur est grignoté par « une cellule folle qui grandit » ; Serge Delaive, avec une suite d’épures où les accents d’une douleur lancinante se mêlent à une révolte éjaculée « debout / sous la voie lactée » ; Yolanda Castaño, poétesse espagnole dont son traducteur Frédéric Bourgeois a rendu la narquoise « beauté d’épi » de ses vers, qui circulent en ligne brisée jusqu’au rendu de la terrible sentence : « Seule la vérité rend / esclaves » ; Maxime Hanchir enfin, qui livre une série de portraits subtilement biseautés, tracés d’un fusain sensible non dénué d’ironie, doux-amer juste ce qu’il faut. Ajoutez à cela les présences flottantes et anxiogènes, silhouettes intubées et autres loups ectoplasmiques dessinés par la Marolienne de Liège Sofie Vangor, et vous obtenez un carnet de « Poésie Pur Porc », à lire à hue et à dia, de traviole et de guingois, à l’envers comme à l’endroit. Continuer la lecture