Archives par étiquette : Verticales

Verbe, obstétrique et kintsugi

Sophie WEVERBERGH, Précipitations, Verticales, 2022, 272 p., 20 €, ISBN : 9782072950094

weverbergh precipitationsLa littérature est un champ de bataille, un combat. Mené contre soi ou contre les autres. Dans Précipitations, premier roman de Sophie Weverbergh, le récit s’apparente à un ring sur lequel danse une narratrice nommée Pétra. Ou plutôt, conforme à l’étymologie de son prénom, Pétra est une pierre, un petit caillou qui coule. En treize chapitres ancrés dans une esthétique de la distance et de l’humour, Pétra, 37 ans, enceinte, mère d’un jeune garçon, belle-mère de deux autres enfants, nous délivre des monologues coulés dans une introspection météorologique. Une auscultation des précipitations mentales qui la frappent alors qu’elle est gravide. Un fragment de Poésie verticale de Roberto Juarroz se tient aux avant-postes de ce récit qui décrit les cercles concentriques de ce qu’on peut appeler dérives intérieures ou psychose périnatale dans notre société contemporaine qui psychiatrise à tour de bras pour mieux contrôler, enfermer, annihiler ceux et celles qui ne jouent pas le jeu de la grande machine sociale. Continuer la lecture

La Morte tellement Vivante

Un coup de cœur du Carnet

Hubert ANTOINE, Les formes d’un soupir, Verticales, 2021, 272 p., 19,50 € / ePub : 13.99 €, ISBN : 9782072932250

antoine les formes dun soupirMelitza, Mexicaine gorgée de jeunesse et assoiffée d’amour, danse et cadence ses passions, ses révoltes, ses pulsions. Melitza veut, tance, réclame la vie… qui la malmène et la quitte pourtant. Ce fruit juteux aux promesses suaves et acidulées se voit transpercé d’une balle brutale, en pleine poussière d’une rue de Santa Lucía, sous les rayons d’un soleil tardif et les yeux incrédules de son père. Evo, son protecteur huichol aux iris saphir, ramasse alors son enveloppe meurtrie et s’enfuit avec elle. Cette course impérieuse paraît de prime abord étrange, mais « son rapport au monde est tout à fait particulier. Toujours en accord avec la nature, avec les saisons, avec l’équilibre, avec l’instant. Il ne fait rien qui ne soit parfaitement juste. Chacun de ses gestes est en grâce, en logique et en harmonie avec ce qui l’entoure. C’est l’être le plus magnifique qui soit ». Et le mystère se dissout en effet, dans les eaux vertes d’un étang, lorsque l’Indigène s’emplit du dernier souffle de sa soupirante, aspirée dans un mouvement aussi ferme que tendre par la Mort et le chaman. C’est de cette curieuse façon que débute Les formes d’un soupir, continuation de Danse de la vie brève qui constitue toutefois une œuvre singulière et complète en soi. Continuer la lecture