Six auteurs belges mis en musique (plus un) et où les écouter

littérature et musique

Aragon interprété par Jean Ferrat, Madame Deshoulières par Jean-Louis Murat et Isabelle Huppert, Baudelaire par Mylène Farmer… : si le cinéma puise souvent ses sujets dans les romans, la chanson se tourne quant à elle plus naturellement vers la poésie. 

La littérature belge a fait elle aussi l’objet de plusieurs transpositions musicales, certaines bien connues, d’autres plus confidentielles. Voici une sélection de six auteurs et autrices mis en musique, avec un bonus.


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1 – Maurice Maeterlinck : Debussy et tous les autres

À tout seigneur tout honneur : Maurice Maeterlinck, seul Belge à avoir reçu le prix Nobel de littérature (1911), est aussi probablement celui qui a connu les transpositions musicales les plus notables. Pelléas et Mélisande a inspiré à lui seul William Wallace (une suite pour orchestre), Claude Debussy (un opéra), Arnold Schönberg (un poème symphonique), tandis que Gabriel Fauré et Jean Sibelius ont tous deux composé des musiques de scène pour des représentations de la pièce.

L’extrait à écouter. Le théâtre de Maeterlinck n’est toutefois pas le seul pan de son oeuvre à avoir inspiré les compositeurs. Six de ses Douze chansons ont ainsi été été mises en musique par le compositeur autrichien Alexander Von Zemlinsky en 1913.

2 – Maurice Carême, poète aimé des musiciens

Maurice Carême pâtit souvent de sa réputation de poète pour récitations scolaires. Une récente anthologie parue dans la collection « Espace Nord », Nonante-neuf poèmes, a mis à jour la variété et la subtilité de sa palette. Les grands musiciens ne s’y sont quant à eux pas trompés. Francis Poulenc, Darius Milhaud ou encore Carl Orff comptent parmi ceux qui ont mis en musique la poésie de Carême.

L’extrait à écouter. En 1960, Francis Poulenc compose La courte paille, un cycle de sept mélodies pour voix et piano, à partir d’autant de poèmes issus de deux recueils : La cage aux grillons et Le voleur d’étincelles.

3 – Les chansons de Max Elskamp

Les titres des recueils de Max Elskamp disent d’emblée son attachement à la musicalité : Six chansons de pauvre homme pour célébrer la semaine de Flandre, Chansons désabusées et La chanson de la rue Saint-Paul notamment. On ne s’étonnera pas vraiment, dès lors, que ses poèmes aient inspiré les musiciens. Son recueil Dominical (1892) a ainsi partiellement été mis en musique par le compositeur surréaliste belge André Souris et dans son entièreté par le Breton Paul Ladmirault.

L’extrait à écouter. Pas moins de cinq poèmes de Max Elskamp figurent sur l’album Les poètes belges chantés par Julos Beaucarne, Barbara d’Alcantara et Béatrice Wilbaux – sur 27 titres au total! Le poète voisine avec Maeterlinck, Henri Michaux, Odilon-Jean Périer, Marcel Thiry et Liliane Wouters. Parmi ces cinq poèmes : Le jardinier, chanté par Julos Beaucarne.

4 – Norge par Jeanne Moreau

Si les textes de Norge ont été chantés par différents interprètes, on retient surtout que Jeanne Moreau lui a consacré un disque entier, sorti en 1980.  « Ses poèmes m’ont paru simples, évidents, avec des mots qui allaient droit au cœur… J’ai eu envie de les dire puis d’en faire des chansons pour un disque. Certaines sont drôles ou cruelles, d’autres tendres, agressives, humoristiques« , disait de lui l’égérie de la Nouvelle Vague.


Lire aussi : notre recension de Jeanne Moreau chante Norge


L’extrait à écouter. Vingt-deux textes de Norge figurent sur l’album Jeanne Moreau chante Norge. Parmi celles-ci : Fille d’amour.

5 – Amélie Nothomb à l’opéra

Ce n’est certes pas l’aspect le plus connu de son oeuvre, mais Amélie Nothomb a eu elle aussi les honneurs de la transposition musicale. La romancière, dont les livres ont déjà fait l’objet d’adaptations pour le théâtre et pour le cinéma, et qui a par ailleurs elle-même écrit des paroles de chansons pour Robert et Juliette Greco, a été par trois fois transposée à l’opéra, chaque fois par le compositeur belge Daniel Schell. Il a repris les trois premiers livres de Nothomb : Hygiène de l’assassinLe sabotage amoureux et Les combustibles.

L’extrait à écouter. Les combustibles est le premier opéra inspiré d’Amélie Nothomb signé par Daniel Schell (en 1997), à qui on doit aussi un opéra autour de l’oeuvre de Christian Dotremont.

6 – Charles Van Lerberghe, hier et aujourd’hui

Comme Max Elskamp, Charles Van Lerberghe est présent sur l’anthologie de la poésie belge chantée par Julos Beaucarne, Barbara d’Alcantara et Béatrice Wilbaux (disponible en intégralité en ligne). Avant cela, Van Lerberghe avait toutefois inspiré les compositeurs français Gabriel Fauré et Paul Lacombe. Ce dernier a mis en musique six poèmes en 1909.

L’extrait à écouter. Gabriel Fauré a composé, de 1906 à 1910, La chanson d’Eve, un cycle de dix mélodies pour voix et piano, à partir du recueil du même nom de Charles Van Lerberghe.

BONUS : Henri Vernes en terre indochinoise

En 1982, le groupe français Indochine bâtit le texte de sa chanson L’aventurier sur des références aux aventures de Bob Morane, imaginées par le Belge Henri Vernes. N’adaptant pas un épisode particulier des aventures du héros, ne racontant pas non plus vraiment une histoire, la chanson relève plutôt du name-dropping. Les références aux titres des livres d’Henri Vernes y pleuvent : de La vallée infernale (« Égaré dans la vallée infernale »), à Terreur à la Manicouagan («En pleine terreur à Manicouagan »), en passant par L’ombre jaune (« À la recherche de l’Ombre Jaune ») ou encore Le sultan de Jarawak (« Prisonnière du Sultan de Jarawak ») – entre autres. Une recette gagnante : la chanson reste l’un des plus gros succès du groupe dont elle a lancé la carrière.

L’extrait à écouter. Un clip new wave pour le seul tube de cette sélection.