Archives par étiquette : forêt

Ils ont vu le loup

Jean-Pol HECQ, L’armée des loups, M.E.O., 2025, 196 p., 20 € / ePub : 12,99 €, ISBN : 9782807005259

hecq l'armée des loups2035. À la faveur de ce léger bond dans le temps, les guerres sur terre ont poursuivi leurs ravages et leurs mutations. Toujours davantage de machines commandées à distance remplacent les soldats sur le terrain et pourchassent l’ennemi par les airs et sur terre. Voici que les forces armées européennes (ceci est bien une fiction) développent le projet d’un robot militaire auquel ils ont donné l’apparence d’un loup. Celui-ci est capable de se faufiler partout de jour comme de nuit, de tout filmer et identifier et il peut devenir un tueur redoutable, insaisissable, qui n’hésitera pas à s’autodétruire si nécessaire. Alors que les dernières mises au point et essais ont lieu, le projet doit être présenté aux autorités européennes pour envisager sa mise en production et son intégration à de futures opérations. Ce qui ne manque pas de soulever bien des questions auprès des responsables, notamment quant au recours à l’intelligence artificielle dans les logiciels qui animent cette arme redoutable tenue au plus grand secret. Continuer la lecture

La forêt cocon

Daniela GINEVRO, Lisières. Contes de petites filles dans la forêt, Lansman, 2023, 80 p., 12 €, ISBN : 9782807103917

ginevro lisieresDans LisièresDaniela Ginevro revisite cinq contes populaires : Le petit chaperon rouge, Hansel et Gretel, Les chaussons rouges, Vassilissa-la-très-belle et Boucle d’or. Ces célèbres histoires mettent en scène des petites filles des forêts à qui l’autrice dédicace son texte. Qui sont-elles ? Leurs noms nous sont familiers : le petit chaperon rouge, Gretel, la petite fille aux souliers rouges, Vassilissa, Boucle d’or… Mais il y en a tant d’autres. Continuer la lecture

L’enfant et la forêt

Daniela GINEVRO, Au-dedans la forêt, Lansman, 2023, 52 p., 10 €, ISBN : 9782807103856

ginevro au dedans la foretAu cœur d’une forêt mystérieuse et parait-il maudite, rôde une enfant des bois, « couverte de peaux d’animaux. Un masque d’écorce sur le visage, un couteau à la ceinture ». Surnommée La Mésange, elle raconte son présent et son passé. Comment elle est arrivée dans la forêt, accompagnée de son frère, Le Géant, et de sa sœur, La Renarde. Ils se sont « évaporés » dans les bois pour échapper à la maison au toit fêlé, à son froid qui s’insinuait partout, à la faim qui les tiraillait, à l’absence qui y régnait. De cette période dans la maison au toit fêlé où ils vivaient tous trois collés serrés, on n’en apprendra pas beaucoup plus, si ce n’est que les parents n’étaient plus là et que de nombreuses cicatrices invisibles datent de cette époque. Son frère, bien qu’étant l’aîné, est resté petit suite à une chute dans les escaliers. La Mésange parle de leurs premiers jours dans la forêt. Comment ils ont enterré leurs noms et s’en sont choisi de nouveaux. Elle évoque leur vie à trois dans les bois jusqu’à l’accident qui a scindé leur groupe à tout jamais. Peu à peu, la forêt devient son territoire, devient sienne. La solitude ne l’effraie pas. La nature, les animaux, les bruits sont là. Continuer la lecture

C’est un arbre, une forêt

Sara GRÉSELLE, Silva, Esperluète, coll. « Cahiers », 2023, 20 p., 11,90 €, ISBN : 9782359841688

greselle silvaEn latin, Silva désigne le bois, le bosquet et, au figuré, une grande quantité, une matière abondante. Dans la langue de Sara Gréselle, le concret et l’imagé fusionnent, et Silva évoque ainsi à la fois la femme-arbre et la femme-forêt. En termes éditoriaux, Silva se concentre en une plaquette, mince et allongée : 20 pages, seulement, à la sève épaisse et collante qui circule irrésistiblement, irrigue profondément. Silva, pluriellement singulière et singulièrement plurielle.

Dans ce texte puissant, Gréselle s’arrête sur une expérience intime, qu’une femme sur quatre connaîtrait, ce qui d’ailleurs « […] ne chang[e] rien à la solitude de l’expérience ». Un jour de Vénus pas très lointain donc, « une de [s]es branche a été arrachées. Non, ce n’est pas ça : une de [s]es branche est tombée. Ça n’a pas fait le bruit qu[’elle] avai[t] imaginé ». Les mots posés soulignent la délicatesse du moment et trahissent un mouvement qui ne souffre aucun retour en arrière : une fois que la branche, qui partage le flux vivant, les terminaisons nerveuses et la pulsation intérieure, se détache, elle retourne à la terre, qui accueille en silence. Il faut ensuite cautériser l’écorce blessée, accepter le temps de la cicatrisation et « faire confiance aux racines, au réveil du printemps, le temps que revienne, un jour, le chant des oiseaux ». Car le cycle, immuable, suivra son cours. Continuer la lecture

Cernes de famille

Chantal DELTENRE, La Forêt Mémoire, maelstrÖm, 2016, 110 p., 12 €

deltenreComment imbrique-t-on dans sa mémoire les souvenirs, doux ou douloureux ? Comment faire pour qu’ils se transfigurent, se floutent et ne nous digèrent pas tout cru ?
Dans La Forêt-Mémoire, la narratrice, encore enfant, a planté à son seul usage une canopée sensible imaginaire. Au plus profond, comme dans autant de boules à neige, elle peut à loisir éteindre ou animer les scènes qu’elle a vécues : Grande, la mamy aimante, en train de raccommoder un chandail. Grand, le pépé communiste, feuilletant Le Drapeau Rouge en quête d’une nouvelle manif où il l’emmènerait. La Ducasse d’Ath et ses Géants au dernier week-end d’août, les bords de la Dendre et la statue de Saint Antoine, qui veille sur la plus jeune occupante de la maisonnée. Il reste malgré tout des paysages qui grésillent bien trop à son goût, sous tension ou au mieux, vidés de tout lien. Des moments qu’elle ne maîtrise guère: tous ceux où apparaissaient ses parents, mariés très jeunes et comme encombrés de leur progéniture. Continuer la lecture