Archives par étiquette : Bleu d’encre

Les spectres d’Albert

François DEGRANDE, Trois fantômes biodégradables, Bleu d’encre, 2022, 168 p., 16 €, ISBN : 978-2-930725-52-9

degrande trois fantomes biodegradablesOrné de dessins de Philippe Joisson, de M. la Mine et de l’auteur, cette fable en vers de François Degrande s’ouvre sous une épigraphe on ne peut plus révélatrice : Inspiré de faits réels basés sur une fiction…

Le recueil raconte les multiples tentatives manquées de spiritisme auxquelles se livre le narrateur. La première s’ouvre sur une invention capable de bouleverser l’équilibre économique des sociétés d’auteur dans le monde (nous n’en dévoilerons pas davantage ici pour ne rien divulgâcher). Continuer la lecture

Au cœur de nos pénombres

Suzy COHEN, Identités plurielles, Bleu d’encre, 2022, 109 p., 14 €, ISBN : 978-2-930725-54-3

cohen identités pluriellesLa belle enseigne des éditions Bleu d’encre ne cesse d’enrichir son catalogue. Avec Identités plurielles de Suzy Cohen, le public peut découvrir le deuxième recueil de cette autrice qui est aussi artiste plasticienne (réalisant notamment de la peinture sur porcelaine, une technique qu’elle enseigne aussi). On se souviendra de Femmes entre Éros et… son premier ouvrage, un livre d’artiste paru aux éditions Traverse, dans la collection « AMBO ».

La couverture d’Identités plurielles est ornée d’une œuvre de la poète : une encre monochrome, représentant un arbre dont les racines se déploient à la surface d’un terreau de signes et lettres d’un alphabet inconnu. Continuer la lecture

Oblitérer l’instant

Liliane SCHRAÛWEN, Traces perdues, Bleu d’encre, 2022, 13,95 €, ISBN : 9782930725512

schrauwen traces perduesLe second recueil de poèmes de Liliane Schraûwen, confié aux bons soins de Claude Donnay chez Bleu d’Encre, engage le lecteur sur un chemin parsemé de souvenirs vivaces, semblant prendre le contrepied de son titre marqué par le passage et l’oubli.

Traces perdues, c’est en quelque sorte dire deux fois la disparition : celle de la chose dans la trace, celle de la trace dans son propre effacement. Déplacement de l’oubli que dément par essence toute pratique d’écriture, même ordinaire. L’écriture de Liliane Schraûwen n’est, du reste, pas ordinaire. Elle est d’abord littéraire. Elle est ici poétique. Elle est également, on le comprendra vite, ontologique. Continuer la lecture

Le spectre visible de l’être

Tatiana GERKENS, Incandescence, Bleu d’encre, 2022, 12 €, ISBN : 978-2-930725-53-6

gerkens incandescencesMa dernière cendre sera plus chaude que leurs vie… Ce premier exergue ouvre le recueil Incandescence de Tatiana Gerkens, que publie Bleu d’encre,  la belle maison d’édition de poésie et textes courts dont Claude Donnay a fait le prolongement de la revue éponyme qu’il créa en 1999. Presque un quart de siècle déjà d’une attention constante et attentive à la création poétique.

Balise annonçant, avant la traversée de la lecture, l’intensité des pages à venir, l’exergue est extrait des confessions de Marina Tsvetaïeva réunies sous le titre Vivre avec le feu, à partir des notes et carnets que la poétesse russe n’a jamais cessé d’écrire, malgré les pires conditions d’une existence tragique qu’achèvera un suicide. Continuer la lecture

L’enfance en poésie

Philippe COLMANT, Maison mère, Préface de Philippe Leuckx, Bleu d’encre, 2022, 60 p., 12 €, ISBN : 978-2-930725-50-52

colmant maison mereAuteur de romans policiers et de recueils de poésie, Philippe Colmant nous avait donné, au début de cette année, un recueil : Frères de mots. Il l’avait écrit à quatre mains en complicité avec Philippe Leuckx qui signe une préface sensible et lumineuse au dernier recueil de son désormais « frère de mots ». Ouvrir cette recension en évoquant la complicité créatrice de deux poètes est une manière délibérée de saluer, chez l’un et l’autre, cet entrelacement de l’écriture et de la lecture des œuvres. La préface est le premier partage d’un livre, la première lecture accordée à l’ouvrage, achevé certes, mais encore maladroit au commencement du chemin si escarpé de la publication, de la promotion, de la recherche de ce public dont on dit qu’il s’éloigne de plus en plus du livre. Continuer la lecture

Parlons-en de la vie !

Marcelle PÂQUES, Le cœur en balade, Bleu d’encre, 2022, 50 p., 12 €, ISBN : 978-2-930725-45-1

paques le coeur en balade« Secrétaire, dans une autre vie. Retraitée, elle peut désormais donner libre cours à sa fantaisie » raconte l’excipit titré Marcelle Pâques, dans ce nouveau livret chez Bleu d’encre.  « Femme ordinaire. Vie ordinaire en apparence, car l’extraordinaire est là dans le quotidien », lit-on ensuite pour expliquer les trente-trois textes courts qui précèdent et forment un bloc-notes de réflexions et sentiments. La généreuse préface d’Éric Allard saisit bien l’intention de l’auteure : L’art de la joie. Sur la couverture, au-dessus de l’illustration enfantine par Catherine Hannecart d’une semeuse de coquelicots : Le cœur en balade. Continuer la lecture

Chant d’amour au prince charmant

Dominique PENEZ, Ode à l’amant imaginaire, Bleu d’encre, 2021, 42 p., 10 €, ISBN : 978-2-930725-43-7

penez ode a l amant imaginaireAvec ses poèmes lancés vers les nuages, Dominique Penez livre chez Bleu d’encre son rêve le plus authentique et originel, inassouvi, insaisissable.

Dites-moi
            que c’est possible

La poésie est un espace d’enchantement où chacun peut prendre ses désirs pour des réalités ; telle est l’œuvre merveilleuse du livre qui matérialise cela. Ainsi, l’autrice s’en donne à cœur et corps joie, augmentant son lyrisme par degrés résolus, curieuse de tendre, non, assoiffée de toucher à l’infini, grimpant en courant les barreaux d’une échelle sans fin, qui ne repose sur rien, ni aux pieds ni au sommet, sinon sur l’air ; à la fois l’oxygène et la mélodie du septième ciel. L’Ode à l’amant imaginaire est cet immortel chant d’amour au prince charmant. Continuer la lecture

Une journée, une vie

Daniel CHARNEUX, À bas bruit, ill. de l’auteur, Bleu d’encre, 2022, 81 p., 12 €, ISBN : 378-2-930725-46-8

charneux a bas bruitÉcrire, pour moi, c’est chercher l’écart et la trace, confie Daniel Charneux, né à Charleroi en 1955. L’écart : ce qui sort des sentiers battus. La trace : ce qui témoigne d’un passage. Principalement romancier et nouvelliste, il a publié entre 2001 et 2004 deux romans (Une semaine de vacance et Recyclages) ainsi qu’un recueil de nouvelles (Vingt-quatre préludes) à propos desquels on a pu parler de « légèreté du désespoir ». Norma, roman qui traite de la vie de Norma Jean Baker/Marilyn Monroe (éditions Luce Wilquin, 2006) reçoit en 2007 le Prix Charles Plisnier. C’est dans un cri que nous entrons au monde. C’est dans un cri, parfois, que nous en sortons. Entre les deux, cette souffrance que l’on appelle la vie, a-t-il écrit dans Nuage et eau, son roman le plus abouti, inspiré lui aussi par les liens entre deux personnages historiques, cette fois du bouddhisme japonais : le moine Ryôkan et la moniale Teishin. Ce roman fut finaliste du prix Victor Rossel en 2008. En 2009, Maman Jeanne (éditions Luce Wilquin), qui traite de la condition féminine, fut  sélectionné pour le prix des Lycéens, manqua de remporter le Prix Rossel des Jeunes et est réédité chez Espace Nord en 2016 avec Nuage et eau, accompagné d’une postface de Françoise Chatelain. D’autres romans paraîtront tandis que Daniel Charneux contribue à un essai collectif sur un écrivain prolétarien, collaborateur durant l’Occupation, Pierre Hubermont. Continuer la lecture

Dire adieu à la vie

Pierre YERLÈS, Élégies paisibles, préface d’Alain Dantinne, dessins de Catherine Podolski, Bleu d’encre, 2021, 130 p., 14 , ISBN : 978-2-930725-42-0

yerles elegies paisiblesOn aurait pu croire obsolète l’élégie, ce genre poétique d’origine ancienne où s’éploie une mélancolie existentielle, voire un incurable sentiment de manque ou de perte. Ce serait oublier des écrivains aussi notables que F. Hölderlin, R.M. Rilke, ou plus près de nous J. Grosjean, J. Vandenschrick, C. Esteban. Certes, le langage a changé, l’élan romantique cédant le pas à la sobriété et à la condensation, mais la thématique reste largement focalisée sur le rapport à la mort, question dont on sait le caractère inépuisable. Tel est le créneau dans lequel s’inscrit le petit livre de Pierre Yerlès : face à la proximité de la fin, comment dire adieu à la vie et aux siens sans glisser dans la banalité, l’auto-apitoiement, la grandiloquence, la révolte vaine ? Plus radicalement, pourquoi un tel adieu non par le biais de la parole ou d’une simple lettre, mais sous la forme moins habituelle d’un recueil ? L’auteur répond indirectement à cette question quand il redit sa dilection fervente pour la poésie, de Villon à Neruda en passant par Baudelaire, Apollinaire ou Norge. Sans prétendre égaler de tels prédécesseurs, il voudrait en retenir la leçon essentielle : faire signifier de manière toute personnelle le monde extérieur et intérieur en exploitant les potentialités infinies de la langue. Continuer la lecture

« des siècles tremblants de tant de vie… »

Un coup de cœur du Carnet

Florence NOËL, Assise dans la chute immobile des heures, Bleu d’encre, 2021, 117 p., 12 €, ISBN : 978-2-930725-39-0

noel assise dans la chute immobile des heuresEn 2019, Solombre, le précédent recueil de Florence Noël pour lequel elle a reçu le prix Delaby-Mourmaux, s’ouvrait par une citation d’exergue de l’écrivain mexicain Octavio Paz. Pour Assise dans la chute immobile des heures qui paraît aux éditions Bleu d’encre, l’auteure convie le poète argentin, Roberto Juarroz, à ouvrir le bal. Premiers indices peut-être qui attestent de l’importance accordée au tremblé de la lumière, de cette « lumière fendue d’exactitude », verticale, qui arrose littéralement la poésie de Florence Noël. Comme l’arpenteur du désert dont la vue est troublée par le brouillard à l’horizon, le lecteur perçoit d’emblée ici ce que nous identifions dans les autres recueils à savoir, cette tension constante entre la nuit intraitable, consolatrice et l’ardeur vacillante de la lumière. Véritable « épopée lumineuse », livre solaire sur la table de chevet de la nuit, la langue poétique ne cesse de jouer sur ces contrastes pour révéler l’angoisse profonde d’un trop-plein d’émotions, une crainte ancestrale qui peut surgir à tout instant. « Peur incurable » de ces lendemains qui s’épuisent et au creux desquels même la rosée déchante. Continuer la lecture

Dans l’atelier du petit prince…

Françoise LISON-LEROY, Sauvageon, Bleu d’encre, 2021, 37 p., 10 €, ISBN : 978-2-930725-38-3

lison leroy sauvageonIl aurait pu être un petit prince à qui l’on donne « l’azur, cent peluches ou la mer, s’il en avait voulu », mais c’est un sauvageon ! Tout nu, « tout né », il atterrit, comme par mégarde, « sur une sphère bancale, hostile », toupie folle qu’il gouvernera, « entre sol et ciel », à sa façon, « avec un bruit de menu moteur ». Spontanément perplexe face au monde qui l’accueille, il hurlera d’instinct, pour crier sa présence, pour dire sa conscience. Continuer la lecture

Philippe Leuckx, « le cœur voilé de vie »…

Philippe LEUCKX, Nuit close. Sizains, Bleu d’encre, 2021, 36 p., 10 €, ISBN : 978-2-9307-2537-4

leuckx nuit closeEn poésie, le mouvement de fermeture n’implique pas forcément l’hermétisme. L’expression poétique se condense à l’extrême, atteint une incandescence nucléaire. Toute forme brève devient ainsi une trouée, si moindre soit-elle, ouvrant sur une infinitude insoupçonnée. Chaque mot en est pesé et acquiert une portée, comme on le dit des projectiles, mais qui ici redonneraient vie et sens. Continuer la lecture

À l’instinct et l’instant

Iocasta HUPPEN, Oh, et puis zut !, Bleu d’encre, 2020, 74 p., 12 €, ISBN : 978-2-930725-33-8

huppen oh et puis zutL’ouvrage se conclut par un pédigrée poétique plein de concours, publications et prix. Iocasta Huppen en est à son cinquième recueil de haïkus. Celui-ci, Oh, et puis zut ! est son deuxième chez Bleu d’encre. La couverture est un autoportrait composé de quatre cailloux et trois pommes de pins, et la quatrième de couverture annonce des « poèmes d’humour ». Cependant, les aspects techniques ne sont jamais loin car l’auteure est aussi animatrice d’ateliers d’écriture. Ainsi, elle explique que ses haïkus sont, dans cette publication, davantage des senryu, ce qui « a comme sujet principal les faiblesses humaines ». Continuer la lecture

Le continent du fragile…

Anne-Marielle WILWERTH, Là où s’étreignent les silences, Bleu d’encre, 2020, 85 p., 12€, ISBN : 978-2-930725-34-5

wilwerth la ou s etreignent les silencesComme nous l’évoquions à la fin d’une précédente recension, c’est sur un quai bercé par une brise marine légère que nous retrouvons avec plaisir Anne-Marielle Wilwerth. Un nouveau recueil qui ne pouvait trouver plus bel ancrage que l’enseigne des éditions Bleu d’encre tant les nuances de la couleur bleue semblent iriser l’œuvre de l’auteure. Un bleu peut-être plus dilué ici que dans le dernier livre, Ce que le bleu ne sait pas du fragile, paru en 2019, un peu plus flou, plus léger qui irriguerait des ciels ordinaires où flânent des funambules. C’est donc en empruntant à la palette du peintre son bleu outremer qu’Anne-Marielle Wilwerth poursuit l’édification de sa cathédrale de silence. Chaque recueil venant d’une certaine manière et presque paradoxalement combler les vides d’une architecture vouée à l’effacement, au retrait. Continuer la lecture

Poèmes en trois temps

Martine ROUHART, Dans le refuge de la lumière, Bleu d’encre, 2020, 54 p., 12 €, ISBN : 978-2-930725-32-1

rouhart dans le refuge de la lumiere

Premier dessin après trois poèmes : une femme s’éloigne dans la campagne et l’herbe écrit des mots de loin en proche, depuis l’horizon jusqu’à l’avant-plan. Je marche / en écrivant des phrases / qui se composent / se décomposent / comme la calligraphie / des oiseaux / dans le bleu.

Deuxième dessin après vingt-trois poèmes : un arbre s’effiloche dans la page et le vent invente des mots depuis le tronc jusques au sol. Elles chantent lentement / assoupies / comme des pensées / les feuilles dorées / étincelles d’un soleil attardé. Continuer la lecture

L’ordinaire effronté

Marcelle PÂQUES, Le cristal des jours, Bleu d’encre, 2020, 52 p., 12 €, ISBN : 978-2-930725-31-4

La maison d’édition Bleu d’encre avec son si joli logo, poursuit sa publication de recueils de poésie. Claire, soignée et aérée, au format 11 x 19 cm sur papier crème, elle offre aujourd’hui son vingt-deuxième numéro à Marcelle Pâques, « femme ordinaire, vie ordinaire en apparence », m’écrit-elle par email. Cependant : La tête à l’envers / Les pieds dans les nuages / La vie dégrafe son corsage. Continuer la lecture