Archives par étiquette : Danielle Bajomée

La littérature par le menu

COLLECTIF, La cuisine de nos écrivains, Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique, 2022, 130 p., 15 €, ISBN : 9782803200672

collectif la cuisine de nos écrivains« Il n’y a que les imbéciles qui ne soient pas gourmands. On est gourmand comme on est artiste, comme on est poète ».

Incitant le lecteur au péché de gourmandise, Yves Namur cite Guy de Maupassant dans son introduction aux actes du colloque consacré à La cuisine de nos écrivains qui s’est tenu en octobre 2021, à l’occasion du centenaire de l’Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique. La gourmandise est en effet de mise pour évoquer un sujet d’une telle ampleur. C’est que les écrivains ne manquent pas, qui ont fait de la nourriture un sujet à part entière  ou la métaphore de leur art, et du repas, le subtil décor de leur roman ou le symbole de l’appartenance sociale de leurs personnages. Et que l’on ne s’y trompe pas, les auteurs et autrices dont il est question ici, « nos écrivains », sont belges ou français. Ce sont les écrivains de notre patrimoine littéraire, ceux qui ont façonné (et façonnent encore) notre imaginaire. La gourmandise, comme la littérature, n’a pas de frontière. Continuer la lecture

La vieille dame qui murmurait à l’oreille des marginalisés

Un coup de cœur du Carnet

Yves NAMUR, Nadine VANWELKENHUYZEN, Hélène CARRERE D’ENCAUSSE, David BONGARD, Danielle BAJOMEE, Jean Claude BOLOGNE et S.A.R. Laurent DE BELGIQUE, Centenaire de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, 1920-2020, Textes des discours prononcés lors de la séance solennelle du 16 octobre 2021, Académie royale de langue et de littérature françaises, 2022, 81 p., 10 €, ISBN : 978-2-8032-0065-8

centenaire de l'academie royale de langue et de litterature francaises de belgiqueQu’appréhende-t-on face à des textes prononcés lors d’une cérémonie commémorative ? Du pesant, de l’obséquieux et du byzantin. Or… L’objet-livre, déjà, prédispose en faveur des contenus. Mise en abyme ? Une belle mise en page mais un format réduit, un cahier photographique en guise de témoignage mais une sobriété à mille coudées du livre d’art, etc. Quant aux textes… Passées quelques formules de politesse, ils sont fluides et justes, teintés de second degré et d’empathie. Ils se complètent surtout harmonieusement pour nous offrir une vision synthétique de ce qu’est, de ce qu’a été, de ce que devrait être à l’avenir l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique. Continuer la lecture

« Un poème doit être fatal »

COLLECTIF, Le regard éclairé. À propos de Philippe Jacottet, Reiner Kunze, Franz Moreau, Norge, Joseph Orban, Marcel Piqueray, Quasimodo et André Schmitz, t. II, Taillis pré, 2020, 166 p., 16 €, ISBN : 978-2-87450-161-6

collectif le regard éclairéLe 19 octobre 2019… Une date tout droit sortie du « monde d’avant », celui où il était encore loisible de se réunir devant une scène de concert ou un grand écran, à la tablée d’un restaurant ou, pourquoi pas, pour entendre parler de poésie. C’est ce qui se passait à Bruxelles, ce samedi-là, à l’occasion d’une des rencontres internationales organisées par le Journal des Poètes. Afin de « célébrer cette émotion appelée poésie », les participants y évoquaient tour à tour une figure, belge ou non, et par-delà des voix s’exprimant dans des registres très différents. Continuer la lecture

Claire Lejeune, « voix pourpre » et « contrebandière de la pensée »

Claire LEJEUNE, Pour trouver la clé, il fallut perdre la mémoire des serrures, textes inédits choisis par Anne André, Danielle Bajomée et Martine Renouprez, Arbre de Diane, coll. « Les Deux Sœurs », 2018, 96 p., 12 €, ISBN : 978-2-930822-10-5

La prose poétique, les essais de Claire Lejeune (1926-2008) sont placés sous le signe de la fulgurance, d’une poétique radicalement novatrice qui entend décloisonner les savoirs, les expériences afin de traverser les chapes du pouvoir, de la domination et de recontacter les promesses à venir des origines. Dans les années 1960, La gangue et le feu, Le pourpre, La geste, Le dernier testament, Elle signent l’avènement d’une parole qui noue indissolublement naissance à soi hors des rets du patriarcat, expérience mystique d’un verbe politique et poétique, subversion des piliers d’une civilisation qui a muselé les femmes. De se dire, les sans-voix montent à l’existence, gagnent un processus de subjectivation que Claire Lejeune place sous le signe de l’ouverture à l’autre de la raison et aux terres du symbole. « Nous ne faisons pas la poésie. Elle nous fait de nous défaire » écrivait-elle. Continuer la lecture